L’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail consécutif à un manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur relève de la compétence exclusive du Tribunal de Sécurité sociale

Dans trois arrêts du 3 mai 2018 la Cour de cassation a précisé que si l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du Tribunal des affaires de sécurité sociale, la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé du licenciement.

 

Le partage de compétence juridictionnelle entre le Conseil de prud’hommes et le Tribunal des affaires de sécurité sociale est source de complexité pour le justiciable.

 

A ce titre, la Cour de cassation a prononcé une série de trois décisions pour savoir quelle est la juridiction compétente en cas de contestation par le salarié de son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement qui fait suite à un accident du travail ou d’une maladie professionnelle résultant d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

 

Pour rappel en vertu de l’article L 142-1 du Code de la Sécurité sociale,

 

Le Tribunal des affaires de sécurité sociale statue sur les différends auxquels donne lieu l’application des législations et réglementations de sécurité sociale qui ne relèvent pas, par leur nature, d’un autre contentieux.

 

Aussi, dans le cas d’une faute inexcusable, l’article 452-3 du Code de la sécurité sociale prévoit la possibilité pour la victime de demander à l’employeur, devant la juridiction de la sécurité sociale, la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales

 

A l’inverse, l’article 1411-1 du code du travail prévoit que

 

« Le Conseil de prud’hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient.

 

Il juge les litiges lorsque la conciliation n’a pas abouti. »

 

Ainsi, la Cour de cassation jugeait en 2010 que sous couvert d’une action en responsabilité à l’encontre de l’employeur pour avoir manqué à son obligation de sécurité, la salariée demandait en réalité la réparation du préjudice résultant de l’accident du travail dont elle avait été victime, de sorte que la juridiction de la sécurité sociale était seule compétente pour en connaître.

 

Ainsi, la victime d’un accident du travail dû à la faute inexcusable de son employeur ne peut pas saisir le Conseil des prud’hommes d’une demande de réparation intégrale des préjudices qu’elle a subis.

 

Par la suite, la Cour de cassation a confirmé sa position en considérant que seul le tribunal des affaires de sécurité sociale est compétent pour indemniser les dommages résultant d’un accident du travail, même s’il est la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

 

En effet, dans les faits, le salarié demandait en réalité la réparation du préjudice né de son accident du travail.

 

Les questions de compétences d’attribution impliquent dès lors d’identifier exactement l’objet de la demande.

 

C’est cet exercice de qualification qu’a mené la Cour de cassation dans ses arrêts du 3 mai 2018 pour ensuite rappeler, d’une part,

 

  • Que l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale et que,

 

  • D’autre part, la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En résumé, comme le souligne la Cour de cassation dans sa note explicative,

 

« L’indemnisation allouée par la juridiction prud’homale est donc circonscrite aux conséquences de la rupture abusive ou illicite du contrat de travail ».

 

Pour rappel, depuis 2019 le Tribunal des affaires de sécurité sociale est devenu le Pôle Social du Tribunal Judiciaire.

 

 

Soc. 3 mai 2018, FS-P+B+R+I, n° 17-10.306

Soc. 3 mai 2018, FS-P+B+R+I, n° 16-26.850

Soc. 3 mai 2018, FS-P+B, n° 16-18.116

 

« Si l’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée. »