Licenciement pour faute grave : à quel moment doit se faire la remise des documents de fin de contrat ?

Par un arrêt du 03 septembre 2025 (n°24-16.246), la Haute Cour précise qu’en cas de licenciement pour faute grave, les documents de fin de contrat doivent être dès la date de notification du licenciement.

 

Pour rappel, les articles L. 1234-19, L. 1234-20 et R. 1234-9 du Code du travail imposent à l’employeur de remettre au salarié trois types de documents au moment de la rupture du contrat :

 

  • le certificat de travail ;

 

  • le solde de tout compte ;

 

  • et l’attestation France Travail afin que le salarié fasse valoir ses droits à l’assurance chômage.

 

Remarque : d’autres documents peuvent s’imposer dans certaines situations (exemple : un état récapitulatif de l’épargne salariale), ou dans certains secteurs (exemple : le certificat de congés payés dans le BTP).

 

 

Une rupture du contrat de travail immédiate en cas de faute grave

 

Le contrat de travail prend généralement fin à l’expiration d’une période de préavis.

 

Or, selon l’article L. 1234-1 du Code du travail, aucun préavis n’est dû en cas de faute graveou lourde – la rupture est alors immédiate. Cette situation pouvait ainsi faire naître une incertitude quant à la date de remise des documents de fin de contrat dans l’hypothèse d’un licenciement pour faute grave.

 

Dans cette affaire, la salariée avait été licenciée pour faute grave le 09 avril 2018… pourtant, elle n’avait reçu ses documents de fin de contrat que le 06 juin 2018, soit près de deux mois après son licenciement.

La Cour d’appel avait jugé ce délai acceptable puisqu’il s’agissait de la « fin théorique » du préavis, bien qu’il soit inexistant. La Cour de cassation censure : sans préavis, la rupture prend effet dès la notification, et la remise des documents doit suivre immédiatement.

 

La Haute juridiction précise ainsi la règle :

 

  • en cas de licenciement avec préavis, la remise des documents de fin de contrat se fait à l’issue du préavis ;

 

  • en cas de faute grave (ou lourde) : la remise doit se faire dès le jour de la notification, la rupture étant instantanée.

 

 

Une vigilance accrue pour les employeurs

 

Cette décision confirme la vigilance de la Cour sur le respect des formalités de fin de contrat, dans un contexte où la remise tardive des documents de fin de contrat peut entraîner une astreinte ou des sanctions pénales (art. R. 1238-3 du Code du travail).

 

Le risque est d’autant plus grand pour les employeurs que le salarié est également fondé à demander la réparation du préjudice subi en lien avec cette remise tardive, tel qu’une difficulté à faire valoir ses droits aux allocations chômage (Cass. soc., 22 mars 2017, n° 16-12.930). Le salarié devra néanmoins prouver l’existence d’un tel préjudice devant les juges du fond (Cass. soc. 11 janv. 2006 n° 03-46.055 ; Cass. soc. 14 sept. 2016 n° 15-21.794).

 

Les employeurs doivent donc anticiper la préparation des documents de fin de contrat lors d’une procédure visant une faute grave.

 

 

Cass. soc., 3 sept. 2025, n°24-14.546

 

Réponse de la Cour

 

Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-19, L. 1234-20 et R. 1234-9 du code du travail :

 

  1. Selon le premier de ces textes, le salarié a droit à une période de préavis avant rupture de son contrat de travail lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave.

 

  1. Selon les trois derniers de ces textes, l’employeur délivre au salarié, au moment de la rupture de son contrat de travail, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et des attestations permettant au salarié d’exercer ses droits aux prestations sociales.

 

  1. Il en résulte qu’en cas de licenciement pour faute grave, l’employeur délivre ces documents au salarié dès la rupture, qui intervient au moment de la notification du licenciement.

 

  1. Pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour délivrance tardive des documents légaux, l’arrêt retient qu’il est admis que ces documents comme l’attestation destinée à pôle emploi, doivent être remis à l’expiration du contrat de travail, c’est-à-dire à l’issue du préavis effectué ou non, et qu’en cas de remise tardive, le salarié peut prétendre à des dommages-intérêts s’il prouve le préjudice qui en est résulté.

 

  1. Il ajoute qu’en considération de la date du licenciement le 9 avril 2018 et de la fin du préavis, il n’y a pas de faute dommageable dans la remise par l’employeur des documents de fin de contrat le 6 juin 2018.

 

  1. En statuant ainsi, alors qu’elle constatait que la salariée avait été licenciée pour faute grave le 9 avril 2018, ce dont il résultait qu’en l’absence de préavis, l’employeur devait lui délivrer, dès cette date, les documents de fin de contrat, la cour d’appel a violé les textes susvisés.