Code du travail : les ambitions de la réforme en cours

La commission Badinter a remis ce 25 janvier 2016 au Premier ministre son très attendu rapport sur les principes essentiels du droit du travail. Ramassés sur douze pages, ces 61 « droits » constitueront une sorte d’ordre public social auquel ni le législateur ni la branche ni l’entreprise ne pourront déroger. Ils devraient être repris dans le projet de loi.

C’est une liste de 61 principes fondamentaux du droit du travail identifiés par les neuf membres de la commission présidée par Robert Badinter qui sont édictés.

Ils devront être insérés dans un chapitre préliminaire du code du travail.

Ils ne constitueront pas un préambule en tant que tel car l’idée n’est pas que ces principes aient une valeur supérieure au reste du code du travail. Pourtant, pour certains principes c’est déjà le cas comme le reconnaît le comité. « Certains des principes dégagés ont une force juridique supérieure à celle de la loi, qu’ils aient valeur constitutionnelle ou qu’ils figurent dans des conventions internationales ou des textes de l’Union européenne ».

Ce qu’a voulu avant tout faire la commission est de mettre fin à une faiblesse « structurelle » du code du travail : « Il faut des principes au début d’un code ; en droit du travail on n’a jamais fait la différence entre ce qui devait relever de la loi, du réglementaire et des accords collectifs », a expliqué Robert Badinter. « Ils constitueront pour ceux qui interprètent et appliquent les règles un système cohérent de référence » ; il s’agit aussi « de donner au droit une plus grande lisibilité et clarté ».

Des principes fixés à droit constant

Ces principes pourront évoluer au gré des nécessités et des transformations du monde du travail.

Par ailleurs, il a été insisté sur le caractère non exhaustif de la liste. « Ils n’épuisent pas les droits fondamentaux auxquels l’accord collectif ne pourra pas déroger ; ils posent les fondations ». Cette liste se veut donc un point de départ pour le vaste projet de refondation du code du travail, qui « va enjamber le quinquennat », comme l’a souligné le Premier ministre.

Une consécration légale pour certains principes

Parmi les principes édictés, la plupart sont déjà bien connus et inscrits dans le code du travail, mais certains formalisent des orientations jurisprudentielles et, à ce titre, leur donnent une dimension nouvelle :

L’article 3 prévoit que « le secret de la vie privée est respecté et les données personnelles protégées dans toute relation de travail ». Ce principe est à relier aux évolutions des nouvelles technologies. Aujourd’hui, cette règle est avant tout encadrée par des dispositions édictées par la CNIL (géolocalisation, logiciels RH,…) et par la Cour de cassation (outils informatiques).

L’article 9 prévoit que « la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale est recherchée dans la relation de travail ». Il s’agit là avant tout d’une préoccupation jurisprudentielle, par exemple dans des contentieux liés à la mobilité ; le code du travail lui donne corps par bribes. Ainsi, le nouvel article L. 3123-14-2 issu de la loi du 14 juin 2013 prévoit que « le contrat de travail à temps partiel peut être conclu pour une durée inférieure à 24 heures à la demande du salarié soit pour lui permettre de faire face à des contraintes personnelles, soit pour lui permettre de cumuler plusieurs activités ».

L’article 15 qui encadre l’entretien d’évaluation est également intéressant. Il prévoit que « les procédures de recrutement ou d’évaluation ne peuvent avoir pour objet ou pour effet que d’apprécier les aptitudes professionnelles. Ces procédures respectent la dignité et la vie privée de la personne ».

Enfin, le principe de faveur est consacré en tant que tel comme principe fondamental. L’article 56 prévoit ainsi qu’« en cas de conflit de normes, la plus favorable s’applique aux salarié X ». Avec une nuance toutefois, « si la loi n’en dispose pas autrement ».