Le salarié en arrêt pour « burn-out » est-il protégé contre le licenciement pour absence prolongée ?
Il vient d’être jugé qu’un salarié en arrêt maladie pour « burn-out » peut bénéficier de la protection contre licenciement au titre des accidents du travail, même s’il n’a effectué aucune demande de reconnaissance à ce titre auprès de la sécurité sociale, dès lors que l’employeur a connaissance de l’origine professionnelle de sa maladie.
Explications à la lumière d’une jurisprudence du 18 septembre 2019.
Dans cette affaire, un salarié avait été placé en arrêt maladie du 3 juin 2014 jusqu’au 31 mai 2015 pour « burn-out » par un médecin psychiatre.
L’employeur l’avait licencié le 16 janvier 2015 pour absence prolongée perturbant fortement le fonctionnement de l’entreprise nécessitant de remplacer définitivement le salarié, ce qui en soi est un motif de licenciement valable en cas d’arrêt de travail « classique » (maladie ou accident non professionnel).
Contestant son licenciement, le salarié avait saisi le juge. Il s’estimait en effet victime d’un accident du travail et réclamait à ce titre l’application de la protection contre le licenciement.
La législation interdit à l’employeur de licencier un salarié en arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle, sauf dans deux cas (c. trav. art. L. 1226-9) :
-s’il justifie d’une faute grave du salarié ;
-ou de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie.
En dehors de ces deux cas, tout licenciement est nul (c. trav. art. L. 1226-13).
En l’espèce, le licenciement prononcé par l’employeur ne reposait sur aucun de ces motifs.
Néanmoins, la cour d’appel avait refusé au salarié le droit de se prévaloir de cette protection contre le licenciement au motif que celui-ci n’avait effectué aucune demande de reconnaissance d’accident du travail auprès de la caisse primaire d’assurance maladie.
Au regard des éléments présentés par l’employeur quant à la perturbation de l’entreprise occasionnée par l’absence prolongée du salarié (nécessité de remplacer le salarié, désorganisation du service, surcharge de travail pour les collègues), la cour d’appel a estimé que le licenciement était bien justifié.
Or, pour la Cour de cassation, la protection peut s’appliquer en l’absence de déclaration d’accident du travail par le salarié
Elle rappelle que la protection contre le licenciement prévue par l’article L. 1226-9 du code du travail n’est pas subordonnée à l’accomplissement de la déclaration de l’accident du travail à la caisse primaire d’assurance maladie par le salarié.
La protection joue si l’employeur a connaissance du caractère professionnel de l’accident lorsqu’il licencie le salarié (cass. soc. 17 janvier 2006, n° 04-41754, BC V n° 14).
En l’espèce, avant de valider le licenciement et alors que le salarié soutenait avoir été victime d’un accident du travail, la cour d’appel aurait dû rechercher, comme l’y invitait le salarié, si l’employeur n’avait pas connaissance, au moment du licenciement, de l’origine professionnelle de sa maladie.
L’affaire sera donc rejugée.
Elle amène l’employeur à beaucoup plus de precautions avant de mettre en place dans ce cas un licenciement pour désorganisation de l’entreprise.
Cass. soc. 18 septembre 2019, n° 18-12910 D
« Vu l’article L. 1226-9 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient que le licenciement était motivé par la situation objective de l’entreprise qui se trouvait dans la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié dont l’absence prolongée perturbait le fonctionnement de l’entreprise, et que le salarié n’avait effectué aucune demande de reconnaissance d’accident du travail ou de maladie professionnelle ;
Qu’en se déterminant ainsi, alors que le salarié soutenait avoir été victime d’un accident du travail, et que l’application de l’article L. 1226-9 du code du travail n’est pas subordonnée à l’accomplissement des formalités de déclaration de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle à la caisse primaire d’assurance maladie, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :
CASSE ET ANNULE »