Travail à temps partiel : la charge de la preuve pèse sur l’employeur

Preuve d’un travail à temps partiel : l’employeur doit impérativement démontrer la durée exacte du travail convenue

Dans l’affaire jugée le 2 avril 2014, une salariée engagée verbalement par une association sous plusieurs contrats à durée déterminée a sollicité la requalification de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet.

Rappelons que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

À défaut, l’emploi est présumé à temps complet.

La cour d’appel a débouté la salariée de sa demande.

Selon les juges d’appel, la salariée ne contestait pas qu’elle travaillait à temps partiel et travaillait à temps plein pour une autre association de sorte qu’elle ne pouvait se tenir constamment à la disposition de son employeur contrairement à ce qu’elle prétendait.

La Cour de cassation censure cette analyse et reproche aux juges de ne pas avoir constaté que l’employeur démontrait la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, du travail convenue.

Elle rappelle ainsi que pour écarter la présomption de travail à temps complet, l’employeur doit prouver cumulativement deux éléments (cass. soc. 21 novembre 2012, n°11-10258 BC V n° 304 ; cass. soc. 20 juin 2013, n°1020507 , BC V n° 161 ; cass. soc. 2 avril 2014, n° 12-21879 D) :

-la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue ;

-le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

Notons que le fait que le salarié travaille pour une autre entreprise peut en revanche être invoqué par l’employeur lorsque le contrat ne mentionne pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois (cass. soc. 30 mars 2011, n° 0970853D).

En savoir plus : www.avocat-jalain.fr

Maître JALAIN

Avocat en Droit du Travail

Cass. soc. 2 avril 2014, n° 12-21879 D

« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l’article L. 3123-14 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu’il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ;


Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X… a été engagée verbalement en qualité de monitrice éducatrice par l’association AFOR du 3 janvier 2003 au 30 juin 2010, au sein des établissements AFOR Maison Marie-Louise et AFOR Maison d’Ariane, dans le cadre de plusieurs contrats à durée déterminée ; qu’elle a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ;


Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes en requalification de la relation de travail en contrat à temps complet et en paiement de rappels de salaire en conséquence, l’arrêt retient que la salariée ne contestait pas qu’elle travaillait à temps partiel pour l’association AFOR et qu’elle travaillait à temps plein pour l’association ASEPARG ; qu’elle ne pouvait donc ni occuper un poste à temps complet au sein de l’association AFOR ni se tenir constamment à la disposition de cette association ;


Qu’en statuant ainsi, sans constater que l’employeur démontrait la durée exacte, hebdomadaire ou mensuelle, du travail convenue, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute Mme X… de ses demandes en requalification de la relation de travail en contrat à temps complet et en paiement de rappels de salaire en conséquence et fixe à 677,90 euros l’indemnité de requalification, 1 355,80 euros l’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, 881,77 euros l’indemnité de licenciement, 4 709,02 euros les dommages-intérêts pour licenciement abusif et 250 euros l’indemnité pour défaut d’information sur le droit individuel à la formation l’arrêt rendu le 10 mai 2012, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;


Condamne l’association AFOR aux dépens ;


Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association AFOR à payer à Mme X… la somme de 3 000 euros ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille quatorze. »