Résiliation judiciaire aux torts de l’employeur et indemnité de préavis
Par cet arrêt en date du 28 avril 2011, la Cour de cassation juge que dès lors que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée aux torts de l’employeur, l’indemnité de préavis est toujours due.
La Haute cour semble opérer ici un revirement de jurisprudence. Elle avait en effet considéré auparavant que le salarié ne peut prétendre au paiement d’une indemnité pour un préavis qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter (congé parental).
La solution ici retenue marque la volonté de sanctionner l’employeur fautif en limitant la possibilité d’échapper au versement de l’indemnité compensatrice de préavis dans le cadre de la résiliation judiciaire prononcée à ses torts.
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Soc.28 avril 2011, FS-P+B n°09-40.708
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° J 09-40. 708 et C 09-40. 840 ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Riom, 16 décembre 2008), que Mme X…a été engagée le 6 mars 1989 par la société Areste informatique en qualité d’ingénieur commercial ; que la salariée, en arrêt de travail pour maladie depuis le 14 octobre 2003, a été placée en invalidité 1re catégorie à compter du 14 octobre 2006 ; que contestant le montant des sommes qui lui étaient versées au titre du maintien de sa rémunération en application des dispositions de la convention collective applicable et du régime obligatoire de prévoyance, Mme X…a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail et à la condamnation de son employeur au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner au paiement de diverses sommes à titre de complément de salaire, de dommages-intérêts pour non-respect de la garantie de salaire, d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement injustifié, alors, selon le moyen, que toute décision de justice doit mentionner le nom des magistrats qui en ont délibéré ; que cette condition n’est pas remplie lorsque, comme en l’espèce, la décision mentionne que trois magistrats ont assisté aux débats et au délibéré (M. Payard, président ainsi que Mme Sonokpon et M. Nicolas, conseillers) et indique que le rapport a été effectué par un quatrième magistrat (M. Thomas), dès lors que cette présentation contradictoire ne permet pas de connaître l’identité des magistrats qui ont délibéré, en violation des dispositions des articles 454, 457 et 458 du code de procédure civile ;
Mais attendu que ce moyen est devenu sans objet dès lors que par arrêt rendu le 30 juin 2009, la cour d’appel de Riom, statuant d’office, a rectifié l’erreur dont était entaché son arrêt du 16 décembre 2008 quant à la composition de la cour ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de dire qu’il a commis des manquements justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts en ne versant pas à Mme X…l’intégralité des sommes auxquelles elle avait droit pendant sa période de maladie, et de le condamner à lui payer diverses sommes à titre de complément de salaire, d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement injustifié, alors, selon le moyen :
1°/ que l’avis d’une commission d’interprétation instituée par un accord collectif ne s’impose au juge que si l’accord collectif lui donne la valeur d’un avenant ; que lorsqu’une telle valeur est accordée à l’avis de la commission d’interprétation en vertu non pas du texte initial mais d’un avenant à la convention collective, seuls s’imposent au juge les avis postérieurs à l’entrée en vigueur dudit avenant, les avis antérieurs conservant, à moins que l’avenant n’en dispose autrement, la valeur qui était la leur à la date à laquelle ils ont été émis ; que la cour d’appel, qui a jugé en l’espèce que le salaire de référence à prendre en compte pour le calcul des sommes dues par l’employeur au titre du maintien du salaire en cas de maladie, devait être calculé sur la base de la moyenne mensuelle des 12 derniers mois en se fondant directement sur l’avis en date du 27 mai 1993 de la commission d’interprétation instituée par la convention collective du commerce de détail de papeterie, fournitures de bureau, de bureautique et informatique et de librairie du 15 décembre 1988, cependant qu’antérieurement à l’avenant n° 5 du 8 octobre 1997 étendu par arrêté du 5 mai 1998 (JORF 16 mai 1998), l’article 1. 8 de la convention collective, qui institue la commission d’interprétation, ne prévoyait pas que les avis de celle-ci auraient valeur d’avenant de sorte que l’avis rendu en 1993 ne pouvait avoir une telle valeur, a violé l’article 1. 8 de la convention collective du commerce de détail de papeterie, fournitures de bureau, de bureautique et informatique et de librairie dans sa rédaction applicable à l’espèce antérieure à l’avenant n° 5 du 8 octobre 1997 ainsi que l’article 1134 du code civil ;
2°/ qu’en se fondant sur un avis de la commission d’interprétation qui ne les liait pas, cependant qu’il lui incombait de rechercher elle-même le sens des articles 3. 13. 2 et 5. 8. 2 de la convention collective, qui fixaient les obligations de l’employeur en matière de maintien du salaire en cas de maladie, la cour d’appel a méconnu son office et a violé les articles 3. 13. 2 et 5. 8. 2 précités de la convention collective du commerce de détail de papeterie, fournitures de bureau, de bureautique et informatique et de librairie, ensemble les articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1184 du code civil ;
3°/ que l’accord relatif à la prévoyance sociale du 10 décembre 1990 prévoit seulement l’obligation, pour l’employeur, de souscrire auprès d’un organisme tiers un contrat de prévoyance destiné à prendre le relais de l’obligation de maintien des salaires, à hauteur de 90 %, mise à la charge de l’employeur durant les 90 premiers jours d’arrêt de travail pour maladie ; qu’il n’était pas contesté en l’espèce que l’employeur avait exécuté cette obligation en souscrivant un contrat de prévoyance collective auprès du Groupe Mornay ; que dès lors, en imputant à faute à l’employeur le fait que Mme X…n’aurait pas perçu l’intégralité des sommes qui lui étaient dues au titre du contrat de prévoyance, cependant que l’employeur était seulement tenu de souscrire un contrat de prévoyance collective et non de garantir sa bonne exécution, la cour d’appel a violé par fausse application les articles 1, 2 et 5 de l’accord relatif à la prévoyance sociale du 10 décembre 1990, ensemble l’article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1134 et 1184 du code civil ;
4°/ qu’en toute hypothèse la rémunération de référence pour le calcul des sommes dues au titre de l’obligation de maintien du salaire en cas de maladie ne comprend pas les éléments du salaire qui ne rémunèrent pas le travail proprement dit mais sont liés à la simple présence du salarié ou aux servitudes particulières attachées à la prestation de travail ; qu’en affirmant que les primes de fin d’année devaient être intégrées dans le salaire de référence sans rechercher à quelles conditions le versement de ces primes était subordonné, ce qui conditionnait l’intégration ou non de ces primes dans la base de calcul de l’indemnisation due à la salariée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 3. 13. 2 et 5. 8. 2 de la convention collective du commerce de détail de papeterie, fournitures de bureau, de bureautique et informatique et de librairie du 15 décembre 1988, ainsi que des articles 1, 2 et 5 de l’accord relatif à la prévoyance sociale du 10 décembre 1990, ensemble l’article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1134 et 1184 du code civil ;
Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel, qui a retenu, d’une part, que selon l’avis du 27 mai 1993 rendu par la commission d’interprétation de la convention collective du commerce de détail de papeterie, fournitures de bureau, bureautique et informatique et de librairie du 15 mars 1988 pour l’application des articles 3. 13. 2 et 5. 8. 2 de la convention collective, la période de référence à retenir pour le calcul de la moyenne mensuelle du salaire de référence était celle des douze derniers mois lorsque le salaire comprend une rémunération variable, d’autre part que selon l’article 2 de l’accord du 10 décembre 1990 relatif au régime de prévoyance, le traitement de référence est égal au salaire net moyen perçu au cours des douze derniers mois précédant l’arrêt de travail, enfin que cette disposition a été reprise par l’avenant non étendu du 2 juin 1994 modifiant l’article 3. 13. 2 précité, a énoncé à bon droit que le salaire de référence pour la garantie de salaire prévue par les articles 3. 13. 2 et 5. 8. 2 de la convention collective est celui des douze derniers mois précédant l’arrêt de travail ;
Attendu, ensuite, qu’il résulte des dispositions de l’article 3. 13. 2 de la convention collective que les salariés absents pour maladie reçoivent un pourcentage de la rémunération brute qu’ils auraient gagnée s’ils avaient continué à travailler et de celles de l’accord du 10 décembre 1990 que les indemnités versées sont égales au complément nécessaire pour que le salarié perçoive 100 % de son traitement net imposable, celui-ci devant correspondre au salaire net moyen perçu au cours des douze derniers mois ; que la cour d’appel en a exactement déduit que la prime de fin d’année et la prime de 13e mois devaient être prises en compte pour déterminer le montant du salaire de référence ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner au paiement de certaines sommes à titre d’indemnité de préavis et de congés payés afférents, alors, selon le moyen, que le salarié ne peut prétendre au paiement d’une indemnité pour un préavis qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter ; que la cour d’appel, en condamnant la société Areste à payer à Mme X…une indemnité de préavis et les congés payés y afférents cependant qu’elle constatait que la salariée, qui était en arrêt de travail depuis le 14 octobre 2003, était dans l’impossibilité d’exécuter le préavis, a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;
Mais attendu que dès lors que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée aux torts de l’employeur, l’indemnité de préavis est toujours due ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;