Rémuneration variable et objectifs assignés du salarié : quelles sont les obligations de l’employeur ?

La rémunération d’un salarié peut être composée d’une seule base fixe ou comporter également une part variable.

 

Ce mode de rémunération, autrefois réservé principalement aux salariés ayant des fonctions commerciales, se généralise singulièrement au sein des entreprises lesquelles y voient, avec raison, un véritable outil de motivation et de fidélisation de leurs collaborateurs.

 

Toutefois, ce mode de rémunération appelle de la part de l’employeur une grande vigilance dès lors que le manquement de l’employeur à ses obligations peut emporter des conséquences financières importantes.

 

Si les objectifs assignés au salarié peuvent être définis par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, la jurisprudence a néanmoins fixé des principes s’imposant à l’employeur :

 

  • les objectifs doivent être réalistes et réalisables, fondés sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur. Dans le cadre de la détermination des objectifs, l’employeur doit prendre en compte la durée du travail du salarié, l’environnement économique dans lequel il évolue, etc.

 

  • les éléments déterminant la rémunération variable doivent être vérifiables par les salariés.
  • les objectifs devront être établis et communiqués au salarié en français au risque d’être déclarés inopposables au salarié, et ce même si celui-ci est totalement bilingue.

 

 

Dans quel document ou source  sont prévus le objectifs du salarié  ?

 

Les objectifs peuvent être fixés par accord des parties ou décidés par l’employeur seul. Lorsqu’ils ne sont pas atteints et que le salarié est licencié pour insuffisance de résultats, le juge doit rechercher si les objectifs étaient réalistes et si le salarié est responsable de ne pas les avoir atteints.

 

Autrement dit,le seul fait que le salarié n’ait pas réalisé ses objectifs ne constitue pas en soi un motif de licenciement. (C. trav., art. L. 1232-)

 

Les objectifs doivent-ils nécessairement être fixés par contrat ?

 

L’insuffisance de résultats ne peut valablement être invoquée à l’égard d’un salarié que si des objectifs ont été fixés. Mais ces objectifs n’ont pas nécessairement à être négociés avec le salarié. Il n’est donc pas obligatoire qu’ils soient mentionnés dans le contrat de travail ou dans un avenant. L’employeur peut tout à fait les fixer unilatéralement dans le cadre de son pouvoir de direction (Cass. soc., 22 mai 2001, no 99-41.970). Pour des questions de preuve, il est impératif qu’ils soient notifiés au salarié par écrit.

 

 

Peut-on prévoir, par contrat, que la non-réalisation des objectifs constituera un motif de licenciement ?

 

La clause d’un contrat qui prévoit que telle ou telle circonstance constituera un motif de licenciement n’a aucune valeur car elle ne s’impose pas au juge. Ce dernier conserve, en tout état de cause, son pouvoir d’appréciation (Cass. soc., 14 nov. 2000, no 98-42.371). Autrement dit, quelles que soient les clauses du contrat, c’est le juge qui décidera si le licenciement est justifié.

 

Le salarié peut-il être licencié en fonction des raisons qui ont motivé l’insuffisance de résultats ?

 

Que les objectifs soient fixés par l’employeur seul ou qu’ils résultent d’un accord des parties, la règle est la même : l’insuffisance de résultats ne peut, en soi, constituer une cause de licenciement. Le juge doit rechercher si les mauvais résultats reprochés au salarié procèdent de son insuffisance professionnelle ou de sa faute (Cass. soc., 13 janv. 2004, no 01-45.931

 

En outre, il doit apprécier pour quelles raisons, en fait, les objectifs n’ont pas été atteints. Ces raisons peuvent tenir :

 

– au fait que les objectifs n’étaient pas réalisables ;
– à l’employeur qui n’a pas donné au salarié les moyens de les atteindre ;
– au salarié qui est incompétent ; un licenciement peut alors être prononcé mais pas pour faute
– au comportement fautif du salarié, les mauvais résultats pouvant s’expliquer par sa négligence, son manque de travail ; un licenciement pour faute est alors envisageable.

 

Ainsi, la jurisprudence prévoit que  l’insuffisance de résultats peut justifier un licenciement lorsque le salarié disposait des moyens nécessaires à l’accomplissement des objectifs, que ceux-ci étaient réalisables et que le secteur d’activité ne connaissait pas de difficultés particulières de nature à expliquer ces résultats limités (Cass. soc., 2 déc. 2003, no 01-44.192).

 

Les objectifs doivent être réalistes et réalisables

 

A défaut, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse. Le seul fait de ne pas atteindre ses objectifs ne constituant pas, en soi, un motif de licenciement, les juges doivent, pour prendre leur décision, vérifier que les objectifs étaient raisonnables.

 

Le juge pourra également être amené à vérifier que les objectifs étaient compatibles avec l’état du marché (Cass. soc., 19 avr. 2000, no 98-40.124).

 

 

L’employeur ne doit pas être responsable de la situation de non réalisation des objectifs

 

Le licenciement d’un salarié peut être envisagé si ses objectifs sont raisonnables et si l’employeur lui a donné les moyens de les réaliser..Il appartient à l’employeur de justifier, en cas de contestation, qu’il a bien fourni au salarié les moyens d’accomplir la prestation de travail pour laquelle il a été engagé (Cass. soc., 10 févr. 2004, no 01-45.216).

 

 

A l’inverse, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse si l’employeur par ses decisions ou sa politique commerciale est responsable des mauvais résultats. Cass. soc., 24 mai 2000, no 98-41.614

 

 

La non-réalisation des objectifs peut aussi être due à une mauvaise politique commerciale de l’employeur :

 

–           aux entraves apportées à l’activité du salarié

–           aux instructions multiples, tatillonnes et contradictoires de l’employeur

–           au fait que l’employeur ne livre pas en temps utiles les commandes aux clients

, etc. Dans tous ces cas, le licenciement pour insuffisance de résultats est sans cause réelle et sérieuse.

 

Les juges doivent rechercher si les mauvais résultats sont imputables au salarié, c’est-à-dire s’ils proviennent de son insuffisance professionnelle ou d’un comportement fautif (Cass. soc., 3 avr. 2001, no 98-44.069)

 

Quelles sanctions en cas de défaut de fixation des objectifs ?

 

L’employeur encourt plusieurs risques s’il ne détermine pas les objectifs pour ses salariés bénéficiant de rémunération variable.

 

Ce dernier est obligé par le code du travail  de fixer les objectifs sous peine de devoir payer la totalité de la rémunération variable au salarié qui la réclamerait en justice.

 

Il a en effet été jugé par la cour de cassation à maintes reprises  qu’en l’absence de fixation de la prime d’objectif, les Juges condamnent l’employeur à la prime d’objectif maximale (Cass. Soc. 26 avril 2017 n°15-26817)

Ainsi  à  défaut pour l’employeur de fixer les objectifs, le salarié pourra saisir le juge prud’homal et  versement de la part variable de sa rémunération. À cet égard, les juges détermineront le montant de la part variable au regard du montant versé les années précédentes ou, à défaut de référence, au montant maximal prévu au titre de la rémunération variable.

 

En outre, la Cour de cassation a tranché, et ce à maintes reprises, en faveur des salariés dont l’employeur n’aurait pas fixé les objectifs. La Cour précise notamment que le défaut de fixation des objectifs était un élément justifiant la rupture d’un contrat de travail et ce, aux torts directs de l’employeur.