Régime social de l’indemnité versée au titre de la violation du statut protecteur

Dans un arrêt récent rendu le 12 février 2015, la Cour de cassation qualifiait de salariale, l’indemnité versée au titre de la violation du statut protecteur du salarié.

Qualification conforme à la lettre l’article L. 2422-4 du Code du travail qui dispose en son dernier alinéa : « ce paiement s’accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire » après avoir pourtant précisé que « l’indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois s’il n’a pas demandé sa réintégration ».

En l’espèce, un salarié sollicitait l’application de l’article susvisé en réaction à son licenciement prononcé sans autorisation administrative préalable.

Remplissant les conditions légales, le salarié obtenait réparation du préjudice subi.

Toutefois, son employeur se voyait assigné en justice aux fins de verser les cotisations sociales afférentes à cette somme.

Ainsi, il convenait à ce stade de déterminer si la somme versée avait la nature de salaire ou d’indemnisation d’un préjudice.

En effet, il ressort de la jurisprudence constante en la matière, que :

les sommes versées au salarié à l’occasion de son départ de l’entreprise sont soumises à cotisations

lorsqu’elles ont le caractère d’un substitut de salaire,

– a contrario, elles en sont exonérées lorsqu’elles présentent le caractère de dommages et intérêts.

Or, en l’espèce, un doute pouvait légitimement être émis en ce que la somme versée est forfaitaire et sanctionne le manquement de l’employeur.

Toutefois, il doit être rappelé que le préjudice subi du fait du licenciement abusif est déjà réparé par le versement de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Or, le même préjudice ne saurait être réparé et indemnisé deux fois.

En conséquence, la Cour de cassation confirme la nature salariale de l’indemnité versée au titre de la violation du statut protecteur du salarié.

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Cass. soc. 12 février 2015, n°14-10886

« LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à la date d’exigibilité des cotisations litigieuses, L. 5422-20 du code du travail et 59 du règlement général annexé à la convention du 18 janvier 2006 relative à l’aide au retour à l’emploi et à l’indemnisation du chômage, approuvée par arrêté du ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement du 23 février 2006, ensemble l’article 80 duodecies du code général des impôts dans sa rédaction applicable ;

Attendu que l’indemnité pour violation du statut protecteur, qui n’est pas au nombre des indemnités non imposables au titre de l’impôt sur le revenu des personnes physiques limitativement énumérées par le dernier de ces textes, est soumise aux cotisations sociales et d’assurance chômage en application des deux premiers ;

Attendu qu’à la suite d’un contrôle portant sur les années 2007 à 2009, l’URSSAF de la Sarthe, aux droits de laquelle vient l’URSSAF des Pays de la Loire, a notifié à la société Class réseau agricole (la société) un redressement résultant, notamment, de la réintégration dans l’assiette des cotisations et contributions de sécurité sociale et des cotisations d’assurance chômage, de l’indemnité versée à M. X…, salarié protégé licencié sans autorisation administrative, en exécution d’un arrêt rendu le 25 juillet 2008 par la cour d’appel de Nancy ; que, contestant ces seuls chefs de redressement, la société a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour accueillir ce recours, l’arrêt retient que sont assujetties aux cotisations de sécurité sociale les sommes versées lors de la rupture du contrat de travail et ayant la nature de rémunérations, que l’indemnité pour violation du statut protecteur versée au salarié licencié sanctionne la méconnaissance par l’employeur du statut protecteur du salarié, mais ne répare pas le préjudice subi par celui-ci du fait de la rupture de son contrat de travail et n’a pas, dès lors, la nature d’un complément de salaire ; que le fait qu’elle n’est pas visée par l’article 80 duodecies du code général des impôts comme ne constituant pas une rémunération imposable résulte de ce qu’elle ne vient pas réparer les conséquences préjudiciables de la rupture du contrat de travail ; que sa nature indemnitaire l’exclut de l’assujettissement aux cotisations sociales ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a accordé la remise des majorations de retard initiales sur les cotisations hors frais professionnels, l’arrêt rendu le 19 novembre 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes ;

Condamne la société Class réseau agricole aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Class réseau agricole et la condamne à payer à l’URSSAF des Pays de la Loire la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille quinze. »