Quelle est la portée juridique de la signature du solde de tout compte ?

 

Le reçu pour solde de tout compte fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat.

 

Une fois signé par le salarié, il peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

 

Le salarié ne pourra plus  alors contester en justice le défaut de versement de toute ou partie des sommes visées au terme du solde de tout compte (art. L. 1234-20 du Code du travail).

 

Ainsi du coté de l’employeur, il est indispensable de recueillir la signature du salarié lors de son solde de tout compte pour permettre de faire valoir une fin de non-recevoir sur toute demande relative à des rappels de salaires tant au titre des heures supplémentaires qu’au regard de la rémunération variable, des primes ou de toute autre créance de nature salariale.

 

Mais coté salarié, l’intérêt n’est pas le même surtout en cas de différent sur des salaires ou primes non versés car si le salarié ne signe pas le solde de tout compte, celui-ci n’aura aucun effet liberatoire et celui-ci pourra solliciter son du dans le cadre des seuls delais de prescriptions applicables.

 

Se posait toutefois la question de la délimitation de cet effet libératoire lorsque le solde de tout compte est signé par le salarié.

 

Dans une affaire,  un salarié démissionnaire va contester son solde de tout compte  plus de 6 mois après la signature de son reçu pour solde de tout compte, et solliciter en justice le versement d’un rappel de salaires au titre des heures supplémentaires non rémunérées qu’il estimait avoir réalisées.

 

La Cour d’appel l’a débouté de sa demande estimant que celle-ci était irrecevable, le salarié n’ayant pas dénoncé le reçu pour solde de tout compte dans le délai légal de 6 mois, il ne pouvait donc plus  réclamer  le versement d’heures supplémentaires sans violer l’article L. 1234-20 du code du travail.

 

Devant la cour de cassation le salarié faisait valoir que son solde de tout compte ne mentionnait que le salaire brut, l’indemnité de congés payés et les indemnités de repas et qu’il ne couvrait pas les heures supplémentaires, de sorte qu’il n’était pas libératoire pour ces sommes.

La chambre sociale de la Cour de cassation n’a pas suivi ce raisonnement jugeant  que le reçu, faute d’avoir été dénoncé dans les 6 mois de sa signature, présentait un effet libératoire pour les sommes versées à titre de salaire.

 

La demande de rappel d’heures supplémentaires constituant une demande  salariale, elle était comprise dans l’effet libératoire donné à la signature du solde de tout compte.

 

 

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 mars 2019, 17-31.514

 

 

« Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevables ses demandes à titre d’heures supplémentaires et de la garantie annuelle de rémunération, outre les congés payés afférents, alors, selon le moyen, que le reçu pour solde de tout compte, qui doit faire l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail, ne devient libératoire pour l’employeur, faute de dénonciation dans le délai de six mois, que pour les sommes qui y sont mentionnées ; qu’en déclarant irrecevables les demandes du salarié faute de dénonciation du reçu pour solde de tout compte, quand le reçu pour solde de tout compte, qui ne mentionnait qu’une somme de 1 956, 40 euros se décomposant comme suit – « salaire brut : 977,87 ; indemnités congés payés : 1383,42 et indemnités repas : 104,80 » – et mentionnait donc uniquement une somme globale à titre de salaire, n’avait pas d’effet libératoire pour des sommes sollicitées à titre d’heures supplémentaires pendant les cinq dernières années en raison de la modification unilatérale du contrat de travail imposée par l’employeur, outre les congés payés afférents, ni pour des sommes dues en raison du non-respect par l’employeur pendant les cinq dernières années de la garantie annuelle de rémunération prévue par la convention collective et les congés payés afférents, la cour d’appel a violé l’article L. 1234-20 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d’appel ayant relevé que le reçu pour solde de tout compte présentait un effet libératoire pour les sommes versées à titre de salaire, et ayant souverainement retenu que les prétentions du salarié constituaient des demandes de rappel de salaire, en a exactement déduit que ce reçu avait un effet libératoire ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la deuxième branche du moyen ci-après annexée, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; »