Puis-je refuser ma mutation disciplinaire ?

Dans le cadre de son pouvoir de direction, le chef d’entreprise peut sanctionner son qui ne se serait pas conformé à ses instructions par une modification de son contrat de travail ce dans le cadre d’une mutation ou une rétrogradation.

Une mutation peut se traduire par une affectation à un nouveau poste à l’intérieur de l’entreprise (mutation interne) ou par une affectation dans un autre établissement de l’entreprise et donc un changement de lieu de travail (mutation externe).

La rétrogradation se caractérise par un déclassement professionnel dans l’emploi, les responsabilités, les fonctions, etc. Ainsi, cette sanction peut entraîner une perte de certains avantages attachés au poste précédemment occupé par le salarié.

Toutefois , le salarié peut s’opposer à cette modification en adressant un courrier à son employeur contestant le bien fondé de la sanction dont il fait l’objet au risque de voir son employeur reprendre la procédure à zéro pour la commuer dans le cadre de son pouvoir de direction en un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Ce licenciement pourra alors être contesté mais cela ne permettra pas au salarié de retrouver son emploi mais simplement d’être indemnisé pour un licenciement jugé abusif.

Tout en restant dans l’entreprise le salarié peut aussi demander au conseil de prud’hommes d’annuler la sanction que constitue la modification disciplinaire du contrat de travail.

Le risque est le même : l’employeur prenant acte de la contestation de la mesure de mutation/ retrogradation doit licencier le salarié et il reviendra au conseil de prud’hommes de statuer sur le caractere proportionné de la sanction.

La procédure applicable :

La modification du contrat de travail dans un cadre disciplinaire est d’abord une sanction ce qui impose à l’employeur de respecter la procédure de sanction disciplinaire prévue par l’article L1332-2 du code du travail

Celle-ci prévoit un entretien préalable avec le salarié afin de recueillir ses explications sur les faits reprochés

L’employeur doit indiquer au salarié qu’il a la possibilité de se faire assister lors de cet entretien.

Après avoir entendu les explications du salarié l’employeur devra notifier sa décision définitive dans un délai compris entre un jour franc et un mois après l’entretien préalable .

L’annulation de la sanction peut résulter de toute erreur de procédure.

S’il maintient sa décision de modification du contrat de travail , la notification qu’il fait au salarié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception doit laisser au salarié un certain délai pour accepter ou refuser le changement proposé.

La réponse du salarié doit être explicite et non équivoque. A défaut d’acceptation claire , l’employeur peut opter pour une autre sanction qui peut aller jusqu’au licenciement . Il appartient alors au salarié de contester la motivation de ce licenciement.

Selon un arrêt de cassation de la Chambre sociale de la Cour de cassation rendu le 02/03/2010, si une modification du contrat de travail ne peut être imposée au salarié, l’employeur qui se heurte au refus d’une mutation impliquant une modification du contrat, peut, dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction aux lieu et place de la sanction refusée qui peut aller jusqu’au icenciement pour faute.

EN SAVOIR PLUS : WWW.AVOCAT-JALAIN.FR

Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale, 2 mars 2010 cassation (08-44902)

« Sur le moyen unique :

Vu l’article 1134 du code civil, ensemble les articles L1232-1, L1235-1, L1332-1, L1332-2, L1332-4, L1332-5 du Code du travail ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a été engagé le 18 avril 1997 en qualité de chef de service après vente par la société Commerciale Automobile de l’Angoumois ; qu’il a été licencié le 20 janvier 2005 après avoir refusé une mutation disciplinaire qui lui avait été notifiée le 4 janvier 2005 ;

Attendu que pour dire ce licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l’employeur au paiement d’une somme à titre d’indemnité de rupture, l’arrêt retient que si la lettre de licenciement prend acte du refus exprimé par le salarié de sa mutation disciplinaire, le licenciement n’a pas pour cause ce refus, mais les motifs énoncés dans la notification de cette mutation ;

qu’il en résulte que l’employeur a sanctionné une seconde fois les mêmes faits en méconnaissance de la règle selon laquelle les mêmes faits ne peuvent être invoqués pour fonder deux sanctions disciplinaires différentes ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l’employeur qui se heurte au refus d’une mutation impliquant une modification du contrat, peut, dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction aux lieu et place de la sanction refusée, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 11 septembre 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Bordeaux «