Puis-je faire entendre un témoin par les juges du Conseil de prud’hommes ?

L’audition d’un témoin par le Conseil de prud’hommes est possible mais il peut être parfois plus efficace de recourir à l’audition d’un « sachant ».
  • L’audition de témoin
L’audition d’un témoin fait partie des mesures d’instruction à la disposition des juges prud’homaux au même titre que le recours à un expert, les vérifications personnelles ou encore la désignation d’un Conseiller rapporteur.
L’audition d’un témoin peut être ordonnée d’office par le juge ou demandée par les parties. C’est au cours du délibéré que les conseillers prud’hommes décident souverainement du recours à cette audition. Leur décision est alors insuscetible de recours.
En cas d’audition, le témoin est cité à comparaitre. Il témoignera à huis clos.
  • L’audition de « tout sachant »(celui qui sait et veut faire part)

Il s’agit là d’une procédure sensiblement différente.

En effet, l’audition du « sachant » se déroulera à l’occasion d’une visite de l’entreprise par les conseillers rapporteurs préalablement désignés par le juge prud’homal (L. 1454-1-2 du Code du travail) dans le cadre de son droit de mettre en oeuvre toute mesure d’instruction légalement admissible (article 143 CPC).

L’initiative peut provenir du juge ou des parties. Toutefois, la décision relève du pouvoir souverain des juges du fond. Elle n’est donc suceptible d’aucun recours.

Le Conseiller rapporteur est nécessairement un membre du Conseil de prud’hommes. En cas de pluralité de conseillers rapporteur, la parité employeur/salairé doit être respectée (R. 1454-2 du Code du travail).

Le(s) conseiller(s) rapporteur(s) prescri(ven)t ainsi toutes mesures nécessaires à la mise en état de l’affaire (R. 1454-1 et 3 C. tr.) tel que :

– la mise en demeure de production de documents;

– l’accès aux documents relatifs au travail illégal auprès des différents services publics ;

– la conservation des preuves ou objets litigieux ;

– le constat d’une conciliation entre les parties ;

l’audition des parties et des tiers.

Sur ce dernier point, l’audition de toute personne présente sur les lieux peut se dérouler lors de la visite de l’entreprise par le(s) conseiller(s) rapporteur(s).

Ainsi, le « sachant » est sur son lieu de travail lors de son audition contrairement au témoin qui est à la barre. La situation est alors plus propice à l’analyse des dires de la personne interrogée.

Face au témoignage, l’audition du « sachant » présente l’avantage de pouvoir entendre toute personne présente sur les lieux, contrairement aux témoins se limitant aux personnes désignés par les parties.

Attention toutefois, si le Conseiller rapporteur n’est pas soumis aux dispositions du Code de procédure civile relatives à l’instruction, il doit veiller à respecter le principe du contradictoire lors de ces auditions.

A l’issue de sa mission, le(s) Conseiller(s) rapporteur(s) peu(ven)t remettre un rapport (écrit ou oral) aux conseillers prud’hommes.

Aucune forme ni aucune obligation de remettre un tel rapport ne sont imposées.

De plus, les conseillers prud’hommes ne sont pas dans l’obligation de reprendre les solutions proposées par le(s) Conseiller(s) rapporteur(s).

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Cabinet de Maître JALAIN – Avocat en Droit du Travail au barreau de Bordeaux

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Avocat Prud’hommes BORDEAUX

Article L. 1454-1-2 du Code du travail (Créé par LOI n° 2015-990 du 6 août 2015 – art. 258 ):

« Le bureau de conciliation et d’orientation assure la mise en état des affaires.

Lorsque l’affaire n’est pas en état d’être jugée devant le bureau de jugement, celui-ci peut assurer sa mise en état.

Un ou deux conseillers rapporteurs peuvent être désignés pour que l’affaire soit mise en état d’être jugée. Ils prescrivent toutes mesures nécessaires à cet effet.

Les agents de contrôle mentionnés à l’article L. 8271-1-2 communiquent aux conseillers rapporteurs, à la demande de ceux-ci et sans pouvoir opposer le secret professionnel, les renseignements et documents relatifs au travail dissimulé, au marchandage ou au prêt illicite de main-d’œuvre dont ils disposent.« 

Article R1454-1 C. tr. :

« Afin de mettre l’affaire en état d’être jugée, le bureau de conciliation ou le bureau de jugement peut, par une décision non susceptible de recours, désigner un ou deux conseillers rapporteurs en vue de réunir sur cette affaire les éléments d’information nécessaires au conseil de prud’hommes pour statuer.
Un ou deux conseillers rapporteurs peuvent également être désignés par la formation de référé, en vue de réunir les éléments d’information utiles à la décision de cette formation.
La décision qui désigne un ou deux conseillers rapporteurs fixe un délai pour l’exécution de leur mission. »

Article R. 1454-2 C. tr. :

« Le conseiller rapporteur est un conseiller prud’homme. Il peut faire partie de la formation de jugement.
Lorsque deux conseillers rapporteurs sont désignés dans la même affaire, l’un est employeur, l’autre est salarié. Ils procèdent ensemble à leur mission. »

Article R. 1454-3 C. tr. :
« Le conseiller rapporteur peut entendre les parties. Il peut les inviter à fournir les explications nécessaires à la solution du litige. Il peut les mettre en demeure de produire dans le délai qu’il détermine tous documents ou justifications propres à éclairer le conseil de prud’hommes.
En cas de non-production des documents et justifications mentionnés au premier alinéa, le rapporteur peut renvoyer l’affaire devant le bureau de jugement. Ce bureau tire toute conséquence de l’abstention de la partie ou de son refus.
Le conseiller rapporteur peut, pour la manifestation de la vérité, auditionner toute personne et procéder ou faire procéder à toutes mesures d’instruction. »
Article R. 1454-4 C. tr. :
« Le conseiller rapporteur ou le bureau de jugement peut ordonner toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves ou des objets litigieux. »
Article R. 1454-5 C. tr. :
« Si les parties se concilient, même partiellement, le conseiller rapporteur constate dans un procès-verbal l’accord intervenu. »
Article R. 1454-6 C. tr. :
« Les décisions prises par le conseiller rapporteur sont provisoires et n’ont pas autorité de chose jugée au principal.
Elles sont exécutoires. Elles ne peuvent faire l’objet d’un recours qu’avec le jugement sur le fond, sous réserve des règles particulières à l’expertise. »