Mon licenciement est-il abusif ? Dois-je saisir le conseil de prud’hommes de Bordeaux

Mon licenciement est-il abusif ou plutôt sera t-il considéré comme tel par le conseil de prud’hommes qui serait saisi de la contestation de mon licenciement ?

C’est la question qui s’impose à tout salarié qui vient d’être licencié par son employeur.

En termes juridiques le « licenciement abusif » est le licenciement qui ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse pouvant le justifier.

Le code du travail dispose qu’il appartient aux juges d’apprécier « le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur ».

Interprétant cette disposition, la Cour de cassation en a déduit plusieurs principes qu’il est utile à celui qui souhaite contester son licenciement de connaitre :

Tout d’abord, il incombe aux juges du fond de « rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement » (Cass. soc. 10 avr. 1996, Bull. civ. V, no 149).

En application de ce principe, le juge prud’homal doit vérifier la cause exacte du licenciement en redonnant leur exacte qualification aux faits.

De même, si le juge ne peut ajouter d’autres faits à ceux invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement, lorsque celui-ci intervient pour un motif disciplinaire, il doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, comme le prétend l’employeur, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Par ailleurs, la jurisprudence considère que « la circonstance que le grief, énoncé dans la lettre de licenciement, n’a pas été indiqué au salarié par l’employeur au cours de l’entretien préalable caractérise une irrégularité de forme, dont l’intéressé n’a pas demandé réparation, qui n’empêche pas le juge de décider que ce grief peut constituer une cause réelle et sérieuse du licenciement » (Cass. soc. 28 mai 1997, Bull. civ. V, no 196).

De même, la Cour de cassation estime que « si le moyen tiré du défaut de motivation de la lettre de licenciement n’a pas été soulevé par le salarié devant les juges du fond, il est nécessairement dans le débat et qu’il appartient donc aux juges de rechercher, au besoin d’office, en respectant le principe du contradictoire, si la lettre de licenciement énonce le ou les motifs du licenciement » (Cass. soc. 5 juin 2001, Bull. civ. V, no 210 ; 26 mai 1999, ibid. V, no 235

Si le licenciement est reconnu par les juges comme abusif alors le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Le licenciement qui ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse est entaché d’une irrégularité de fond qui ouvre droit à réparation pour le salarié. Comme en matière d’irrégularité de procédure les sanctions encourues par l’employeur varient selon la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié.

– salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté et qui travaille dans une entreprise de plus de onze salariés

Le salarié dont le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et qui ne fait pas l’objet d’une réintégration, a droit à une indemnité « qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ».

Cette indemnité est calculée sur la base du salaire brut, perçu au cours des six derniers mois, et non sur la base du salaire net. Comme le précise la Cour de cassation, « l’indemnité due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure à la rémunération brute dont bénéficiait le salarié pendant les six derniers mois précédant la rupture de son contrat de travail » (Cass. soc. 12 janv. 1994, RJS 2/1994, no 143 ; 22 avr. 1992, Bull. civ. V, no 294).

La référence à la « rémunération brute » est une notion plus large que celle du salaire stricto sensu.

Par conséquent, les « primes et avantages en nature dont l’intéressé était bénéficiaire, en sus de son salaire de base » doivent être pris en compte.

– salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté ou qui travaille dans une entreprise de moins de onze salariés

Ces salariés « peuvent prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi ».

C’est aux juges du fond qu’il appartient d’en apprécier l’importance.

Le préjudice subi par le salarié étant apprécié de façon souveraine par les juges du fond, ces derniers ne sont pas tenus par le seuil minimal des six mois de salaire

La réparation ainsi accordée au salarié peut couvrir aussi bien les irrégularités de fond que de forme.

Par conséquent, le cumul des indemnités pour vice de fond et vice de forme est admis en cette hypothèse alors qu’il ne l’est pas lorsque le salarié a plus de deux ans d’ancienneté et qu’il travaille dans une entreprise de plus de onze salariés.

Lorsque le salarié estime qu’il a fait l’objet d’un licenciement vexatoire, il doit en rapporter la preuve. En d’autres termes, il doit démontrer que son licenciement est intervenu dans des conditions vexatoires.

La réparation de ce préjudice est indépendante de l’existence ou non d’une cause réelle et sérieuse.

Ainsi, lorsque le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre à des dommages-intérêts distincts de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de comportement fautif de l’employeur dans les circonstances de la rupture (Cass. soc. 27 nov. 2001, Bull. civ. V, no 360 ; 19 mars 1998, ibid. V, no 159).

. En application de ce principe, les juges du fond sont tenus de rechercher si, comme le soutient le salarié, les conditions de la rupture n’ont pas été abusives ou vexatoires. Ils ne peuvent débouter l’intéressé de sa demande au motif que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 17 juill. 1996, Bull. civ. V, no 290).

Ce préjudice peut être réparé par l’attribution d’une indemnité dont le montant est souverainement apprécié par les juges du fond.

La réparation peut également intervenir sous une autre forme. Ainsi, dans un arrêt du 25 janvier 1999, la chambre sociale a considéré que la publication dans la presse spécialisée du jugement condamnant l’employeur pouvait constituer un mode adéquat de réparation du préjudice subi par le salarié licencié (Cass. soc. 25 janv. 1989, Bull. civ. V, no 64).

MAître JALAIN

email : contact@avocat-jalain.fr

Avocat en Droit du Travail