Maternité : quelle protection dans la relation de travail ?

La Cour de cassation vient de rappeler, lors d’un arrêt du 1e décembre 2021, l’importance de la distinction entre la protection absolue et celle relative de la femme enceinte lors de l’exécution de son contrat de travail.

 

A ce titre, elle juge que pendant les dix semaines suivant l’expiration des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur peut notifier à la salariée enceinte un licenciement pour faute grave non lié à son état de grossesse ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement.

 

 

Pour rappel, tout comme les salariés protégés, la femme enceinte bénéficie d’un statut protecteur dans l’exercice de son contrat de travail.

 

Elle est protégée à l’embauche et durant l’exécution de son contrat de travail pour éviter toute mesure de discrimination liée à son état de grossesse.

 

Le principe de cette protection est posé à l’article L1225-4 du code du travail qui dispose qu‘ « aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l’expiration de ces périodes. »

 

La Cour de cassation est constante sur ce point et précise qu’ « il est interdit à un employeur, non seulement de notifier un licenciement, quel qu’en soit le motif, pendant la période de protection, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision » (Cass. ch. soc. 1er février 2017 n° 15-26250).

 

Il convient toutefois de distinguer deux périodes dans la protection de la femme enceinte salariée :

 

 

 

  • Un licenciement encadré mais possible avant et après le congé maternité de la salariée

 

 

 

La salariée est protégée mais on parle de protection relative pour la période s’étendant entre le début de sa grossesse et le début de son congé maternité, ainsi que pendant les 10 semaines faisant suite au congé maternité.

 

Selon l’article L1225-4 du code du travail, pendant cette période, la salariée enceinte ne peut pas être licenciée, sauf si son employeur justifie d’un des deux motifs prévu audit article soit:

 

  • D’une faute grave ou lourde de la salariée non liée aves son état de grossesse.

 

 

Attention toutefois et toujours selon cet article, si des congés payés sont pris immédiatement au terme du congé maternité, cette période de 10 semaines est reportée à la fin des congés payés.

 

Ainsi, si un licenciement intervient, sauf faute grave ou évènement extérieur, l’envoi d’un certificat médical attestant de la grossesse dans les 15 jours suivant la notification du licenciement permet l’annulation de celui-ci (article L. 1225-5 du Code du travail).

 

 

 

  • Une protection absolue pendant le congé maternité

 

 

A contrario, pendant son congé maternité, la femme enceinte dispose d’une protection dite absolue : son contrat de travail est suspendu et aucun licenciement ne peut lui être notifié durant cette période. (article L. 1225-4 du Code du travail).

 

Ainsi, même si le licenciement a été notifié avant le congé maternité, il ne peut pas prendre effet pendant ce congé.

 

Au surplus, si la salariée décide de ne pas bénéficier de la totalité de son congé maternité, elle reste protégée durant la durée légale ou conventionnelle du congé. Aussi, cette  protection s’étend aux périodes de congés pathologiques légales qui allongent le congé maternité.

 

Toutefois, dans le cadre des CDD, l’état de grossesse n’empêche pas la survenance du terme du contrat (article L. 1225-6 du Code du travail).

 

 

 

Cass. soc., 1er déc. 2021, nº 20-13.339 FP-B

 

En l’espèce, après un congé maternité ayant pris fin le 17 décembre suivi d’un arrêt maladie, une salariée est licenciée pour faute grave le 20 janvier suivant, c’est-à-dire moins de cinq semaines plus tard.

 

Elle saisissait alors la justice pour obtenir la nullité de son licenciement ce que les juges en appel confirmeront.

 

Ils rappelleront qu’il  est interdit à un employeur non seulement de notifier un licenciement, quel qu’en soit le motif, pendant la période de protection absolue, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision. En l’espèce, la convocation à l’entretien préalable au licenciement et ledit entretien avaient eu lieu après le congé maternité, pendant l’arrêt maladie.

 

L’employeur rétorquera qu’un arrêt maladie consécutif au congé de maternité relève de la période de protection relative de dix semaines durant laquelle la salariée peut se voir notifier un licenciement s’il est justifié par une faute grave.

 

La Cour de cassation précisera elle qu’

 

« aux termes [de l’article L. 1225-4 du Code du travail] , aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l’expiration de ces périodes ».

 

Cet article précise aussi que « toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée, non liée à l’état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail [susmentionnées] ».

 

La Haute Juridiction en a conclu que « il en résulte que pendant les dix semaines suivant l’expiration des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur peut notifier un licenciement pour faute grave non liée à l’état de grossesse ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement ».

 

En d’autres termes, les salariées ne bénéficient d’une protection absolue (interdiction de licencier même en cas de faute grave ou pour motif économique) que pendant le congé maternité ou pendant les congés payés pris immédiatement après le congé maternité.