Maître JALAIN, avocat en droit du travail à Bordeaux

10 conseils pratiques avant de contester son licenciement devant le conseil de prud’hommes par Maître JALAIN, avocat en droit du travail

Passer l’annonce fort déstabilisante d’un licenciement, il existe quelques reflexes à observer qui faciliteront grandement la tache du salarié dans la phase de l’après licenciement qui doit lui permettre soit de négocier de façon la plus avantageuse possible une transaction dans le cadre d’une négociation soit, si aucune solution amiable n’apparait possible, « préparer ses armes » dans le cadre d’un contentieux prud’homal à venir.

Le salarié dispose en effet de différents recours et solutions d’accompagnement pour installer un rapport de force intelligent vis-à-vis son employeur.

Il convient ainsi de faire le point sur les reflexes à avoir.

1) Anticipez

Avant même l’annonce officielle du licenciement, évitez d’être pris en défaut, oralement ou par écrit : prenez les choses en amont et répondez systématiquement par ecrit sur la base des reproches qui vous sont faits.

Le cas du licenciement économique ?

En cas de licenciement pour motif économique, l’entreprise respecte ou non les règles. « Mais il reste une marge d’interprétation énorme, il y a toujours des choses à vérifier : la situation de l’entreprise justifie-t-elle le licenciement ? l’entreprise a-t-elle envisagé un reclassement en interne ? C’est une obligation, si elle ne le fait pas on est face à un licenciement abusif », pointe Maître Boutiron.

2) Se préconstituer des preuves

Boite emails, rapports d’activités, d’entretien annuel vous concernant, rapports des délégués du personnel ou du Comité d’entreprise pointant des dysfonctionnements imputables à votre entreprise pour des faits qui concernent votre licenciement …. tous ces documents qui pourront mettre en relief votre efficacité ou vos bons résultats au service de l’entreprise seront essentiels surtout si votre licenciement est de nature disciplinaire ou lié à une insuffisance professionnelle.

La jurisprudence de la cour de cassation a façonné un véritable régime d’immunité pour le salarié qui capte, sans en informer l’employeur, puis utiliser pour sa défense des documents internes à l’entreprise, mêmes si ces derniers revêtent un caractère confidentiel.

En revanche, aucun enregistrement vocal de votre ancien employeur réalisé à son insu, même particulièrement compromettant, ne pourra être recevable comme preuve devant le conseil de prud’hommes, celle-ci étant jugée comme déloyale et donc irrecevable.

Par ailleurs, toutes attestations de salariés ou de clients de votre entreprise qui mettraient à mal la position de votre employeur sont des éléments de preuves particulièrement redoutables.

Il faudra à ce titre penser à faire rédiger ces attestations de façon manuscrite et dans la forme de l’article de l’article 202 du code de procédure civile sans quoi leur recevabilité pourra être aisément contestée par votre ancien employeur.

3) Vous faire assister

Votre employeur ne doit pas avoir pris la décision de votre licenciement avant l’entretien préalable au licenciement puisqu’en vert des dispositions du Code du travail, il est tenu d’indiquer lors de cet entretien les motifs du licenciement envisagé et de recueillir les éventuelles explications du salarié.

Vous n’êtes pas dans l’obligation de vous présenter à cet entretien mais il s’agit d’une opportunité d’exprimer votre point de vue et de vous défendre face à des éléments qui vous sont reprochés.

Pour préparer cet entretien, notez tous vos derniers échanges avec l’entreprise qui pourraient vous être utiles et lister vos arguments et l’interprétation des faits que vous pensez être ceux fondant le licenciement.

Dans les grandes entreprises de plus de 20 salariés, les représentants du personnel sont vos interlocuteurs privilégies en cas de licenciement.

Salariés eux-mêmes de leur entreprise, ils ne bénéficient pas toujours d’une réelle indépendance vis-à-vis de l’employeur.

Si vous travaillez dans une entreprise de moins de 20 salaries, pensez à faire appel au « conseiller du salarié ». Indépendant , souvent issu d’une organisation syndicale, il intervient uniquement à la demande du salarié à partie d’une liste dressée dans les mairies et à la Direccte (Direction du Travail et de l’Emploi) de votre région.

Le représentant du personnel doit obligatoirement vous assister durant l’entretien préalable au licenciement si vous en faites la demande, il s’agit là d’une condition de validité du licenciement.

4) Obtenir le maximum d’explications sur la cause de votre licenciement.

Lors de l’entretien préalable, le délégué du personnel ou le conseiller salarié seront amenés à poser des questions à votre employeur sur les motifs du licenciement envisagé.

Ses questions comme les réponses de votre employeur ainsi que vos observations doivent être notées par écrit par le conseil du salarié ou le représentant du personnel qui vous assiste.

Vous aurez ensuite en cas de contentieux le droit de produire aux débats le compte rendu écrit de cet entretien. Or, cette pièce peut parfois s’avérer déterminante dans le cas où les motifs exposés lors de cet entretien préalable ne sont pas ceux que vous retrouvez dans le corps de votre lettre de licenciement.

5) Eviter autant que possible tout e agressivité à l’encontre de votre employeur

Même si votre licenciement est confirmé à l’issue de cet entretien, partez la tête haute en évitant toute invective ou menace à l’encontre de votre (ancien) employeur.

Votre réseau professionnel doit être préservé, pensez à vos futurs entretiens d’embauche et au fait que vos nouveaux recruteurs auront dans l’idée de contacter votre ancien employeur. Veillez donc à vous mettre d’accord avec votre employeur sur la communication qui sera faite sur votre licenciement auprès des équipes. Demandez-lui ce qu’il a l’intention de dire à vos collègues et de quelle manière…

Ce « pacte de non agression » facilitera également grandement une phase de négociation qui peut alors s’engager sur une transaction financière liée à la rupture de votre contrat.

6) Engager sans tarder un rapport de force

Vous contestez fermement les motifs évoqués par votre employeur lors de l’entretien préalable que vous considérez comme injustes. Faites-lui savoir sans attendre même votre lettre de licenciement.

Vous pouvez également préférer d’ attendre de lire les motifs énoncés dans la lettre de licenciement qui « fixent les limites du litige » pour les contester et pointer dès ce stade des incohérences ou des imprécisions dans les motifs qui sont énoncés par l’employeur.

Cela n’amènera pas forcement votre employeur à revenir sur sa décision de vous licencier, mais le contraindra à vous répondre et donner des précisions sur des points qu’il ne souhaitait pas forcement aborder et qui vont sont favorables.

7) Faites rapidement valoir vos droits

Vérifiez les solutions d’accompagnement auxquelles vous avez droit

En cas de licenciement pour motif économique dans une entreprise de plus de 1000 personnes votre employeur doit vous proposer un congé de reclassement qui ressemble de près à une solution d’outplacement.

Si vous êtes salarié d’une entreprise de moins de 1000 personnes, vous avez droit au dispositif d’accompagnement très favorable du CSP (Contrat de Sécurisation Professionnelle) qui vous permettra de garder des indemnités chômage pendant un an au niveau de votre salaire net avant de basculer sur le régime des demandeurs d’emplois.

Vérifiez que les démarches ont été faites auprès du Pole Emploi

Quel que soit le motif de votre licenciement, faites en sorte d’avoir droit aux indemnités du Pole Emploi en vous faisant confirmer que l’employeur a bien transmis dans délai l’attestation Pole Emploi à l’organisme compétent et qui permet le calcul du délai de carence et des indemnités que vous versera le Pole Emploi.

8 ) Négocier son indemnisation

Seul l’employeur a la faculté d’entamer des négociations après un licenciement lorsque ce dernier n’a pas jugé utile avant de licencier de proposer à son salarié une rupture conventionnelle du contrat de travail.

Si le salarié n’a évidement aucun pouvoir décisionnel en la matière, il peut habillement faire savoir à son employeur qu’il a à sa portée des pièces qui mettent à mal la justification de votre licenciement.

Dès lors quand une transaction financière est envisageable dès votre licenciement notifié, c’est que ce dernier, souvent conseillé par un avocat spécialisé, sait que son licenciement a de fortes chances de ne pas être jugé valide par le conseil de prud’hommes.

Il n’est pas aisé de savoir sur quel montant transiger à ce stade avec votre employeur car il s’agit là de prendre en compte le préjudice du salarié résultant de la rupture de son contrat de travail tout en gardant à l’idée que la transaction est l’expression de « concessions réciproques » entre les parties.

Plusieurs éléments sont alors à prendre en considération tels que son ancienneté dans l’entreprise, son âge et plus généralement évaluer les difficultés qui vont être celles du salarié à retrouver un emploi à un salaire équivalent.

Il n’existe aucune grille légale spécifique pour évaluer son préjudice mais le code du travail donne à l’article L.1235-3 une indication importante, un curseur pour les salariés bénéficiant d’au moins deux ans d’ancienneté dans l’entreprise dans un entreprise d’au moins 11 salariés.

Dans leur cas, le licenciement injustifié donne droit selon ledit article à un minimum de six mois de salaire brut.

A l’autre extrémité, les indemnisations prononcées par les juridictions pour des salariés bénéficient d’une ancienneté importante dans l’entreprise peuvent aller jusqu’à deux ans de salaire bruts.

Seul un conseil avisé et expert en droit social pourra vous aider à cibler précisément l’indemnisation acceptable au stade de la négociation.

Ce dernier vous conseillera également sur la possibilité de garder certains avantages matériels durant quelques mois (téléphone et ordinateur portables, voiture de fonction).

Par ailleurs, les solutions d’accompagnement ( bilan de compétences, outplacement, coaching de carrière pour les cadres supérieurs) se négocient aussi en plus de votre indemnité financière.

Enfin, le fait de ne pas effectuer son préavis et de faire supprimer ou limiter par accord la clause de non concurrence fait aussi partie de la négociation à mener avec votre employeur.

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