Licenciement pour motif économique et acceptation du CSP

Le pouvoir de contrôle du caractère réel et sérieux des motifs invoqués à l’appui du licenciement, que le juge tient de l’article L. 1232-1 du Code du travail, implique la vérification de la réalité des difficultés économiques alléguées par l’employeur et d’un lien de causalité suffisant entre ces difficultés dans le cadre desquelles le licenciement a été prononcé.

Ainsi, la lettre de licenciement doit comporter non seulement l’énonciation des difficultés économiques, mutations technologiques ou de la réorganisation de l’entreprise, mais également l’énonciation des incidences de ces éléments sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié licencié.

A ce titre, la jurisprudence impose à l’employeur de motiver les difficultés économiques, causes du licenciement, indépendamment de la remise en mains propres du contrat de sécurisation professionnel.

Adaptant ces principes au régime applicable à la convention de reclassement personnalisé CRP, renommée aujourd’hui Contrat de Securisation Professionnelle, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé en mai 2009 que l’acceptation de la convention par le salarié ne dispensait pas l’employeur de son obligation de communiquer au salarié, dans un document écrit, le motif économique du licenciement dont il prend l’initiative. (Cass. soc. 27 mai 2009 : RJS 8-9/09 n° 741,)

Ainsi, l’impossibilité dans laquelle se trouve alors l’employeur de notifier une lettre de rupture motivée avant l’acceptation de la proposition de CRP par le salarié justifie que, par dérogation au droit commun du licenciement, il puisse invoquer le motif exposé dans tout autre document remis ou adressé au salarié au plus tard au moment de l’acceptation de la CRP.

Ces principes sont réafimées dans un arrêt de la cour de cassation du 12 juin 2012.

Ainsi, lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une CRP ou CSP , l’employeur doit en énoncer le motif économique :

– soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement,

– soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L1233-15 et L1233-39 du Code du travail,

– soit lorsqu’il ne lui est pas possible d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié de la proposition de convention, dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation.

Par ailleurs et en application des articles L1233-69 et L1235-4 du Code du travail, la Cour de cassation juge qu’en l’absence de motif économique, la convention de reclassement personnalisé devenait sans cause, si bien qu’elle ordonne à l’employeur le remboursement des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié.

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Cass. soc. 12 juin 2012 n° 10-14632

 » LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X…, épouse Y…, qui avait été engagée le 18 avril 1994 en qualité de secrétaire comptable par la société Adis, a accepté le 1er mars 2007 la convention de reclassement personnalisé qui lui avait été remise lors de l’entretien préalable à son licenciement pour motif économique le 20 février 2007 ; qu’elle a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de paiement d’une indemnité de préavis et d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à payer des indemnités au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une convention de reclassement personnalisé, l’employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu’en affirmant en l’espèce que la rupture du contrat de travail de la salariée résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée, avant que l’employeur ne puisse envoyer la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement, était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l’employeur n’avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, quand un tel courrier n’était pas nécessaire, la cour d’appel a violé l’article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et les articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;

2°/ que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une convention de reclassement personnalisé, l’employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail ; que, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié de la proposition de convention, il suffit que le motif économique soit énoncé dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ; qu’en affirmant en l’espèce que la rupture du contrat de travail de la salariée résultant de son acceptation de la convention de reclassement personnalisée était dépourvue de cause réelle et sérieuse dès lors que l’employeur n’avait pas adressé de lettre énonçant le motif économique de la rupture, sans rechercher si le motif de licenciement n’était pas énoncé soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis à la salariée, soit dans la lettre de convocation à l’entretien préalable, soit dans tout autre document écrit remis ou adressé à la salariée au plus tard au moment de son acceptation, quand la cour d’appel a elle-même constaté que l’employeur soutenait la salariée avait eu connaissance de la note explicative, du projet et des motifs de licenciement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 4 de la convention du 27 avril 2005 relative à la convention de reclassement personnalisé agréée par arrêté du 24 mai 2005 et des articles L. 1233-65 et L. 1233-67 du code du travail ;

Mais attendu que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’une convention de reclassement personnalisé, l’employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d’information sur la convention de reclassement personnalisé remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit lorsqu’il ne lui est pas possible d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié de la proposition de convention, dans tout autre document écrit remis ou adressé à celui-ci au plus tard au moment de son acceptation ;

Que l’employeur n’ayant pas soutenu qu’il avait remis personnellement à la salariée un document écrit énonçant le motif économique de la rupture, la cour d’appel, qui, n’ayant pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a constaté qu’il n’avait pas adressé à l’intéressée de lettre motivée, a exactement décidé que la rupture était dépourvue de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles L. 1233-69 et L. 1235-4 du code du travail ;

Attendu que l’arrêt condamne également l’employeur au remboursement aux organismes concernés des indemnités de chômage payées à la salariée du jour de son licenciement au jour de l’arrêt dans la limite de trois mois d’indemnités ;

Attendu cependant qu’en l’absence de motif économique, la convention de reclassement personnalisé devenant sans cause, l’employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, sous déduction de la contribution prévue à l’article L. 1233-69 du code du travail ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :