Licenciement abusif : indemnisation et allocations chômage

Par arrêt du 21 juin 2011, la chambre sociale rappelle à l’ordre les juges du fond s’agissant, d’une part, de l’application de l’article L. 1235-5 du code du travail et, d’autre part, de l’application des garanties conventionnelles applicables en matière de licenciement.


En l’espèce un salarié licencié d’une entreprise de plus de 11 salariés, mais avec une ancienneté de 21 mois, s’était vu accorder par les juges du fond une indemnité sur la base de l’article L. 1235-3 du Code du travail, à savoir au moins 6 mois de salaire.


La décision des juges du fond est censurée par la Cour de cassation qui rappelle que lorsque le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté, les juges doivent indemniser le salarié en raison du préjudice qu’il a subi pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L. 1235-5 du Code du travail.


La Cour rappelle également que le remboursement des indemnités de chômage prévu par l’article L. 1235-4 du Code du travail ne peut être prononcé par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié de moins de 2 ans d’ancienneté.

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Cour de cassation

chambre sociale

22 juin 2011

N° de pourvoi: 09-42697

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… a été engagé le 30 mars 2004 en qualité de directeur administratif et financier par la société Sucrerie distillerie de Souppes-Ouvré fils ; que le salarié, licencié par lettre du 30 décembre 2005 pour insuffisance professionnelle, a saisi la juridiction prud’homale pour contester son licenciement ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article 58-202 de la convention collective nationale de travail en sucrerie, en sucrerie-distillerie et en raffinerie du 1er octobre 1986 ;

Attendu que selon ce texte, « Si le licenciement d’un ingénieur ou cadre intervient pour un motif autre qu’une faute grave ou lourde, il doit être précédé de deux avertissements notifiés par lettre recommandée avec accusé de réception. Il s’écoule un délai minimal de trois semaines entre la date de la notification du premier et du second avertissement et un nouveau délai minimal de trois semaines entre la notification du dernier avertissement et celle du licenciement » ; que ce texte ne s’applique qu’au licenciement pour motif disciplinaire ;

Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient qu’il n’est pas contesté que préalablement à la notification du licenciement le 30 novembre 2005, aucun avertissement n’a été notifié à M. X… par son employeur; que la procédure légale de licenciement n’exclut pas la mise en oeuvre de procédures conventionnelles qui donnent au salarié des garanties supplémentaires; que les dispositions de l’article 58-202 sont applicables hors le cas de faute grave ou de faute lourde et ne distinguent pas d’autres hypothèses ; que le licenciement prononcé en l’espèce au mépris de la procédure conventionnelle est sans cause réelle et sérieuse ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le salarié avait été licencié pour un motif non disciplinaire, ce dont il résultait que les dispositions de l’article 58-202 de la convention collective n’étaient pas applicables, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 1235-3 et L. 1235-5 du code du travail ;

Attendu que pour allouer au salarié une indemnité à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt énonce que compte tenu de l’effectif du personnel de l’entreprise de plus de onze salariés, de l’ancienneté de vingt-et-un mois, et de l’âge du salarié, né en juin 1956, ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, il lui sera alloué la somme de 44 000 euros en application de l’article L. 122-14-4 devenu L. 1235-3 du code du travail ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il appartenait aux juges du fond, le salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté, d’indemniser le préjudice qu’il avait subi pour licenciement sans cause réelle et sérieuse selon son étendue, en application de l’article L. 1235-5 du code du travail, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l’article L. 1235-4 du code du travail ;

Attendu que pour ordonner dans les limites de l’article L. 1235-4 du code du travail le remboursement par la société Sucrerie distillerie de Souppes-Ouvré fils à l’organisme social concerné des indemnités de chômage payées à M. X…, l’arrêt énonce qu’en vertu de ce texte dont les conditions sont réunies, le remboursement des indemnités de chômage par l’employeur fautif est de droit ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que l’ancienneté du salarié dans l’entreprise était inférieure à deux ans, ce dont il résultait que l’article L. 1235-4 du code du travail n’était pas applicable à son licenciement, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE

Maître JALAIN

Avocat en droit du travail

Barreau de Bordeaux