Le salarié qui exerce une activité professionnelle pendant un arrêt de travail est-il passible d’une sanction ?

  • Pendant un arrêt maladie, le contrat de travail est suspendu

 

L’absence justifiée pour maladie suspend le contrat de travail du salarié, ce qui entraîne deux conséquences :

 

– d’une part, le salarié ne fournit plus sa prestation de travail ;

– d’autre part, l’employeur n’est plus tenu de lui verser sa rémunération (même s’il peut avoir à verser un complément aux indemnités journalières de Sécurité sociale, qui n’a pas le statut de salaire).
En revanche, d’autres obligations liées au contrat de travail subsistent. Il s’agit notamment, pour le salarié, de respecter une obligation de loyauté.

 

Mais vers qui s’impose cette obligation  de loyauté ? Vers l’employeur ou la sécurité sociale qui verserait des IJSS indument ?

 

  • Point sur l’obligation de loyauté

 

Pendant la suspension de son contrat de travail, le salarié ne doit pas faire de tort à son employeur : le salarié qui manque aux obligations découlant de l’exécution de bonne foi de son contrat de travail est susceptible d’être sanctionné.

En revanche, l’obligation de loyauté ne signifie pas que le salarié doive rester enfermé chez lui : il garde la possibilité d’exercer une activité, par exemple à titre bénévole et occasionnel.

 

Le critère déterminant dans une telle situation portera sur l’existence ou non d’un préjudice envers l’employeur.

 

Si l’activité professionnelle exercée par le salarié n’entre pas en concurrence avec celle de son employeur, ce dernier ne pourra pas le sanctionner.

 

Sauf qu’en l’absence de définition légale, la jurisprudence définit l’obligation de loyauté au cas par cas, ce qui contribue sans doute au flou entourant la notion. Flou d’autant plus prégnant que l’obligation de loyauté doit coexister avec la liberté du salarié, laquelle doit logiquement prévaloir (Cass. soc., 9 déc. 2009, no 08-41.213).

Ainsi, ne constituera pas un manquement à l’obligation de loyauté le fait pour un salarié, tout acceptant une mutation imposée par l’employeur, de rechercher dans un autre établissement de la même entreprise un emploi conforme à ses aspirations (Cass. soc., 9 déc. 2009, no 08-41.213, préc.). En revanche, vol, détournement de fonds, injures (Cass. soc., 10 déc. 2008, no 07-41.820), malversations, falsification de documents, voire abus de fonctions (Cass. soc., 5 mai 1982, no 80-40.488), constitueront des actes déloyaux et pourront justifier un licenciement pour faute lourde. Les exemples sont nombreux.

 

Finalement, l’obligation de loyauté pourrait être définie a contrario comme l’obligation de ne pas nuire à l’image et au bon fonctionnement de son entreprise, et de ne pas lui porter préjudice, que ce soit en la dénigrant, en proférant des injures ou en lui faisant concurrence (Cass. soc., 21 oct. 2003, no 01-43.943).

 

  • L ’acception de la loyauté retenue par la Cour de cassation reste restrictive.

 

Son non-respect est constitutif d’une faute grave, voire d’une faute lourde justifiant un licenciement. Il incombe à l’employeur d’en rapporter la preuve (Cass. soc. 16 juin 1998 no 96-41.558). L’élément intentionnel doit être caractérisé. Dans une décision récente, la Cour de cassation a en effet précisé que « la seule déloyauté éventuelle de la salariée ne suffit pas à caractériser une intention de nuire à son employeur » (Cass. soc., 2 févr. 2011, no 09-42.943).

 

À moins de manœuvres frauduleuses ou d’une faute caractérisée, indépendamment même du fait que le contrat de travail soit suspendu, la caractérisation de la violation de l’obligation de loyauté a peu de chance d’être retenue par les juges. Et cette approche prévaut également concernant le salarié en arrêt maladie.

Il est ainsi jugé par exemple que  : « pour fonder un licenciement, l’acte commis par un salarié durant la suspension du contrat de travail doit causer un préjudice à l’employeur ou à l’entreprise ».

 

Cass. soc., 15 juin 1999, no 96-44.772 ; Cass. soc., 18 mars 2003, no 01-41.343).

En revanche, une activité bénévole ou occasionnelle (Cass. soc., 28 nov. 2006, no 05-41.845) ; l’exercice d’un loisir deux jours avant la reprise prévue du travail (Cass. soc., 26 janv. 1994, no 92-40.090) ; le fait de participer à un examen (Cass. soc., 2 juill. 1996, no 93-43.529), ne constituent pas des actes de déloyauté. Encore une fois, la faute doit être caractérisée et porter préjudice à l’entreprise.

 

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