Le salarié inapte qui fait obstacle à la recherche d’un poste de reclassement est fautif

En application des articles L. 1226-12 et L. 1226-10 du code du travail, après le refus par un salarié déclaré inapte d’un poste de reclassement, il appartient à l’employeur d’en tirer les conséquences, notamment, en formulant de nouvelles propositions, d’autre part, que la recherche des possibilités de reclassement doit être compatible avec les conclusions du médecin du travail au cours de la visite de reprise.

Dans un arret du 22 juin 2011; la cour de cassation juge que le salarié inapte qui fait délibérément obstacle à la recherche d’un poste de reclassement commet une faute grave.

En l’espèce, le salarié après le refus d’un poste administratif a manifesté son intérêt pour un poste comportant des astreintes en cardiologie alors même que l’avis du médecin du travail était réservé sur ce point. L’employeur l’a convoqué à plusieurs reprises devant le médecin du travail en vue de la recherche d’autres possibilités de reclassement compatibles avec son état de santé.

Le salarié dont le contrat de travail n’est pas suspendu, qui n’est pas en congé, qui perçoit son salaire, qui est soumis au pouvoir de direction de l’employeur, doit se tenir à sa disposition et déférer à toute convocation. Le salarié ayant quitté la France pour un long séjour à l’étranger et s’étant ainsi en toute connaissance de cause délibérément soustrait aux convocations faisant sciemment obstacle à la recherche d’un poste approprié à ses capacités, ce manquement réitéré à ses obligations contractuelles a rendu impossible son maintien dans l’entreprise et constitué une faute grave.

Cass. soc., 22 juin 2011, n°08-40.455

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 18 décembre 2009), que M. X…, engagé en qualité de cardiologue par la société Polyclinique de Grande Synthe à compter du 15 janvier 1977, a été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail à la suite de deux examens médicaux de reprise, les 31 janvier et 14 février 2006 ; que la déclaration d’inaptitude a été confirmée par l’inspecteur du travail puis par le directeur du travail ; qu’après que M. X… a refusé le poste à caractère administratif qui lui était proposé par l’employeur, celui-ci l’a convoqué à plusieurs reprises devant le médecin du travail à l’effet de rechercher les postes de reclassement qui pourraient lui être proposés ; que M. X… a été licencié pour faute grave en raison de son refus réitéré de se rendre à ces convocations ;

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de dire que le licenciement repose sur une faute grave et de rejeter toutes ses demandes
alors, selon le moyen :

1°/ que ne constitue pas une faute grave le fait pour un salarié de ne pas se rendre à une convocation à un examen médical dont l’objet est de vérifier la compatibilité de certains postes pouvant éventuellement lui être proposés à titre de reclassement avec son état de santé ; qu’en cette hypothèse, en effet, il incombe à l’employeur de tirer les conséquences de la non-présentation du salarié à ces entretiens et de le licencier pour inaptitude physique, avec les conséquences légales qui en découlent ; qu’en décidant que le fait pour M. X… de ne pas s’être rendu aux visites médicales auxquelles il avait été convié pour envisager son reclassement constituait une faute grave, la cour d’appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1234-1, L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ qu’est qualifiable de faute grave le comportement du salarié d’une telle gravité qu’il rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que le fait pour M. X… de ne pas s’être rendu à quatre convocations de l’employeur à des visites médicales constituait une faute grave ; qu’en statuant ainsi, après avoir constaté que, lorsqu’il avait été convoqué, le salarié n’occupait aucun poste et se trouvait au Viet-Nam, de sorte que son comportement ne s’opposait manifestement pas à ce que le salarié soit maintenu dans l’entreprise durant son préavis, ce que confirmait d’ailleurs le fait que l’employeur ait attendu plus d’un mois pour procéder au licenciement du salarié, la cour d’appel a violé les articles L. 1222-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ que l’insubordination consiste dans le refus volontaire d’exécuter un ordre de l’employeur ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a imputé à M. X… un acte d’insubordination, sans constater qu’il avait eu connaissance des convocations qui lui étaient adressées, ni qu’il savait avant de partir qu’il allait être convoqué ou reconvoqué, ni qu’il pouvait s’y rendre ; qu’en statuant ainsi, par des motifs qui ne permettaient donc de caractériser ni le fait que M. X… aurait volontairement refusé d’exécuter les instructions de son employeur, ni celui que l’employeur aurait de bonne foi entendu reclasser le salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

4°/ que les juges du fond doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent, sans pouvoir se contenter de simples affirmations ; qu’en l’espèce, en affirmant péremptoirement que M. X… s’était soustrait délibérément aux convocations de son employeur, sans préciser sur quelles pièces elle se fondait pour se déterminer ainsi, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que la gravité de la faute imputée au salarié s’apprécie in concreto au regard des circonstances de la faute, de la situation propre du salarié et notamment de son ancienneté dans l’entreprise et de son comportement antérieur ; qu’en l’espèce, l’exposant faisait valoir qu’il avait exercé pendant trente ans dans la polyclinique, qu’il était âgé de 62 ans au moment des faits et qu’il n’occupait plus aucun poste lors de son licenciement pour avoir été déclaré inapte à l’exercice de sa profession ; qu’en ne recherchant pas si ces éléments n’étaient pas de nature à atténuer la gravité de la faute qui lui était imputée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d’appel a exactement retenu qu’en application des articles L. 1226-12 et L. 1226-10 du code du travail, après le refus par un salarié déclaré inapte d’un poste de reclassement, il appartient à l’employeur d’en tirer les conséquences, notamment, en formulant de nouvelles propositions, d’autre part, que la recherche des possibilités de reclassement doit être compatible avec les conclusions du médecin du travail au cours de la visite de reprise ; qu’ayant relevé que le salarié après le refus d’un poste administratif avait manifesté son intérêt pour un poste comportant des astreintes en cardiologie alors même que l’avis du médecin du travail était réservé sur ce point et que l’employeur l’avait convoqué à plusieurs reprises devant le médecin du travail en vue de la recherche d’autres possibilités de reclassement compatibles avec son état de santé, la cour d’appel, qui a retenu, d’une part, que le salarié dont le contrat de travail n’était pas suspendu, qui n’était pas en congé, qui percevait son salaire, qui était soumis au pouvoir de direction de l’employeur, devait se tenir à sa disposition et déférer à toute convocation, et qui a constaté, d’autre part, que le salarié avait quitté la France pour un long séjour à l’étranger et s’était ainsi en toute connaissance de cause délibérément soustrait aux convocations faisant sciemment obstacle à la recherche d’un poste approprié à ses capacités, a pu décider que ce manquement réitéré à ses obligations contractuelles rendait impossible son maintien dans l’entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les