LE FINANCEMENT DE L’AIDE JURIDICTIONNELLE : L’ACCES DE TOUS A LA JUSTICE

Le Conseil National des Barreaux, réuni en Assemblée générale le 26 septembre 2009 a relèvé les points positifs dans le rapport de la Commission DARROIS sur l’aide juridictionnelle, à savoir :

– Maintien de l’engagement prioritaire de l’Etat sans diminution de l’enveloppe budgétaire actuelle,

– Rééquilibrage d’un barème horaire en temps passé assorti d’un taux horaire en remplacement des U.V,

– Etude d’impact des nouveaux textes notamment en matière de droit de la famille, en droit collaboratif, en droit pénal et nécessité de trouver les financements nécessaires.

En revanche, le Conseil National, s’il n’est pas opposé à une recherche objective de financements complémentaires et pas substitutifs,

Maintient son opposition à la taxation du chiffre d’affaires des professionnels du droit, et

notamment des avocats eu égard à leur contribution majoritaire au système.

Se déclare favorable à la taxation des actes juridiques dont la liste pourrait comprendre :

1. Tous les contrats d’assurances, y compris de protection juridique

2. Les contrats bancaires (prêts – cartes de crédit – etc.)

3. Les baux immobiliers, contrats de locations meublés ou non, promesses de ventes, actes de ventes immobilières

4. Plus généralement, tous les actes soumis à enregistrement et à publicité et/ou déposés au greffe

du commerce ou au greffe civil (partage – successions, etc.)

Le Conseil National propose en outre :

5. Une taxation des jeux

6. Un prélèvement sur le montant des amendes pénales

7. Une majoration des dépens

8. Ainsi qu’une contribution symbolique du justiciable.

Le Conseil National suggère dès maintenant, pour alimenter le budget de l’aide juridictionnelle à périmètre constant d’intervention, que le financement du taux horaire soit effectué en deux volets :

– Une partie par l’Etat,

– Une partie par le financement complémentaire (garanti par l’Etat et sans désengagement).

Il propose enfin de soumettre à la concertation des barreaux les deux questions suivantes :

– La généralisation des protocoles et leur simplification et harmonisation ou, à défaut, leur

suppression à partir du moment où la mise en place des protocoles et des dotations

complémentaires ne sont plus de la responsabilité de l’Etat.

– La création d’une structure spécifique à l’AJ, ou l’adaptation du CNAJ, pour l’organisation et la gestion des fonds de l’AJ, fonds de l’Etat et fonds complémentaire, non fongibles

La Commission DARROIS consacre donc la troisième partie de son rapport à l’aide juridictionnelle, son financement, son coût et son utilité. Selon le texte, l’Etat doit garantir à toute personne un accès à la justice qui constitue un droit fondamental.

Le financement du dispositif mis en place à cet effet incombe à la collectivité et la Commission DARROIS définit trois pistes d’amélioration de son fonctionnement :

• la meilleure satisfaction des besoins du justiciable,

• la diversification du financement de l’accès au droit

• et la meilleure maîtrise du coût de l’aide juridictionnelle.

– Encourager la résolution amiable des conflits

La Commission DARROIS propose de renforcer le rôle des Conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) en instaurant l’obligation légale de créer cette structure dans chaque département. Ces conseils pourraient ainsi proposer des permanences d’information, des consultations juridiques, ainsi que l’assistance d’un avocat dans les procédures de règlement amiable des litiges.

Afin d’encourager le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits, la rétribution des avocats et autres intervenants dans le cadre amiable pourrait être supérieure au barème de l’aide juridictionnelle.

Mieux rétribuer les avocats

Il est proposé de rétribuer les auxiliaires de justice dans le cadre d’une mission d’AJ à l’aide d’une contribution de l’Etat, calculée sur la base d’un coefficient de rétribution horaire minoré révisable, à laquelle s’ajoute un complément de rétribution, financé par un fonds autonome d’indemnisation, financé par les professionnels du droit et géré par le Haut conseil des professions du droit, institution destinée à remplacer le Conseil national du droit.

Le rapport propose de revoir entièrement le barème de rétribution de l’AJ, en harmonisant les coefficients, qui devront tenir compte de la complexité du dossier et en abandonnant le mécanisme de la modulation des unités de valeur (UV). La Commission souhaite également améliorer la prévisibilité de l’honoraire dû en cas d’AJ partielle. A cet effet, elle énumère plusieurs possibilités telles que l’instauration d’un barème indicatif, d’un plafond d’honoraires ou d’une tarification de l’honoraire complémentaire.

Le Fonds autonome d’indemnisation des auxiliaires de justice

Idée phare : la création d’un fonds alimenté à la fois par l’Etat et par l’ensemble des

professions du droit, grâce à une taxe dont le produit devrait avoisiner les 300 millions d’euros.

Le rapport insiste sur la réaffirmation de l’engagement de l’Etat dans le financement de l’aide juridictionnelle mais estime néanmoins nécessaire la création d’un fonds autonome destiné à financer un complément de rétribution des auxiliaires de justice dans le cadre de l’AJ.

La contribution financière des professionnels du droit, affectée à ce fonds, pourra prendre la forme d’une taxe, applicable à l’ensemble des professions exerçant une activité juridique, réglementée ou non à titre principal ou accessoire (experts-comptables notamment).

Plus original, les personnes chargées d’une mission de service public, ainsi que les associations reconnues d’utilité publique, les syndicats et les associations de professionnels régis par le code du travail, les organes de presse autorisés à donner des consultations juridiques ou à rédiger des actes sous seing privé pourraient également contribuer à ce fonds.

Concernant la collecte de la taxe, la Commission estime « désuète » l’instauration d’un droit de timbre et lui préfère une formule de taxation du chiffre d’affaires.

Développer l’assurance de protection juridique

Selon la Commission DARROIS, les assurances de responsabilité obligatoire (multirisque habitation ou assurance scolaire notamment) devraient toutes inclure une garantie protection juridique prenant en charge l’assistance en cas de règlement amiable et les frais de procès relatifs au risque assuré. Cette garantie pourrait être étendue à des contentieux de type familial, tels que les divorces ou la défense pénale des mineurs.

– Maîtriser la demande et le coût de l’AJ : la consultation juridique préalable

Il est proposé d’instaurer une consultation juridique préalable avant toute demande

juridictionnelle, tout en réservant au justiciable la possibilité de saisir directement le BAJ en cas d’urgence et pour certaines procédures, notamment lorsque le demandeur à l’aide est défendeur à l’instance.

Les missions de contrôle exercées par le BAJ seront renforcées afin de prévenir les

demandes abusives ou dilatoires et aussi afin d’appréhender l’opportunité d’un retrait de l’AJ en cas de retour à meilleure fortune du demandeur en cours de procédure. La juridiction saisie pourrait également disposer d’un pouvoir d’appréciation dans ces domaines.

Il est également préconisé de créer une CARPA par cour d’appel pour améliorer la gestion de l’aide juridictionnelle.

La Commission DARROIS affirme enfin qu’Etat et avocats doivent davantage recouvrer leurs dépens, et pour les avocats leur rémunération, auprès de la partie

adverse condamnée lorsqu’elle ne bénéficie pas de l’aide juridictionnelle

Diversifier les financements

Ceci afin de permettre au Conseil National réuni en Assemblée générale de se prononcer à nouveau sur la question du financement complémentaire de l’AJ au risque de se répéter mais après le dépôt du rapport DARROIS.

Sur le caractère indispensable de l’engagement prioritaire de l’Etat à titre liminaire

L’Etat consacre aujourd’hui au budget de l’aide juridictionnelle environ 306 millions :

(Rapport DARROIS pages 87 à 90)

1991 358587 ADMISSIONS

2008 885223 ADMISSIONS

1998 219 MILLIONS

2008 306 MILLIONS

Si l’on compare avec les milliards de livres consacrés au même sujet par la Grande

Bretagne on peut être plus qu’inquiets sur l’avenir des réformes annoncées.

L’engagement de l’Etat bien que nettement insuffisant doit être intégralement

maintenu.

Il s’agit d’une mission régalienne de l’Etat dans la gestion d’un service public.

La réflexion sur la pérennité du système doit s’entendre à périmètre constant, c’est-à-dire finançant les missions d’AJ prévues actuellement par les textes (grille de l’article 91) avec une concertation sur le rééquilibrage de la grille (voir infra).

Il n’est pas question d’abandonner le principe de la rémunération.

Les nouveaux dispositifs législatifs et les missions qui en découlent devront faire l’objet d’une évaluation préalable de leur impact au niveau de l’AJ comme le souhaitait le Sénateur DU LUART.

L’Etat devra donc compléter sa contribution en fonction des nouvelles missions d’AJ qu’il ordonnera ou qui découleront des lois nouvelles dès que celles-ci seront susceptibles de recours à l’AJ.

A propos de l’engagement de l’Etat, il faudra aussi réintégrer dans la contribution de l’Etat, et quelles que soient les solutions adoptées, le montant des dotations complémentaires des protocoles existant actuellement, soit 50 millions et les économies faites par l’Etat du fait du taux de TVA actuel à l’AJ à 5,5 selon les recommandations de la Commission de BRUXELLES d’ailleurs.

Il faudra aussi que l’Etat améliore le taux de recouvrement des fonds dont il fait l’avance et qui pourraient compléter utilement la dotation.

Sur la création d’un fonds complémentaire

Le Conseil National s’était attelé à la recherche de financements complémentaires depuis longtemps même s’il s’agissait pour lui non pas de les proposer mais de s’adapter d’une manière réaliste à la situation.

SUR LE PRINCIPE

A défaut de financement intégral par l’Etat, la réponse ne peut être que favorable à la mise en place d’un tel dispositif mais sous condition.

Ce financement ne peut être que complémentaire et non substitutif.

Par conséquent, son existence et sa mise en place ne peuvent se concevoir sans une garantie complète de l’Etat pour le paiement de toutes les missions engagées au montant de rétribution alloué selon une grille spécifique (procédé détaillé plus avant).

SUR LA FORME : UN FONDS COMPLEMENTAIRE DE GARANTIE DE L’AJ GERE PAR un organisme spécifique à l’AJ

Pour la Commission Accès au droit, plutôt que de créer une nouvelle structure (une de plus), la réforme de l’AJ devrait permettre au CNAJ (Conseil National de l’Aide Juridique) de prendre son essor et de trouver sa véritable place dans nos institutions.

Pour l’instant, le CNAJ n’a qu’un avis consultatif en matière d’AJ. Il faudrait le doter de la personnalité morale.

Depuis sa création, les représentants des professions contributrices de l’AJ et les

consommateurs ainsi que les institutionnels y travaillent dans un esprit de service public et tentent d’aménager par leurs avis un égal accès à la justice et au droit pour les justiciables les plus démunis.

Bien plus qu’une nouvelle entité nécessairement politisée par les modalités de son

recrutement, les membres du CNAJ ont l’expérience du terrain de l’AJ et maîtrisent les sujets qu’ils traitent.

source CNB: www.cnb.fr

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