Indemnisation du conseil de prud’hommes et différée du versement des indemnités chomage
Le salarié licencié qui s’inscrit au Pôle emploi ne peut, d’emblée, percevoir son allocation de chômage.
Conformément au règlement général annexé à la convention chômage du 19 février 2009, un délai de carence de 7 jours ainsi qu’une période de carence liée aux congés payés s’imposent au salarié.
En outre, un différé spécifique est prévu lorsque des indemnités non prévues par la loi ont été versées au salarié.
Or, dans un arrêt du 25 septembre 2012 (n°10-18800), la Chambre sociale de la Cour de Cassation a considéré que, lorsque le Pôle Emploi calcule ce différé spécifique, il doit prendre en considération les dommages et intérêts attribués par le Conseil des Prud’hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En effet, selon la Cour de Cassation, la part des dommages et intérêts versée au salarié non prévue par la loi implique automatiquement un délai de carence.
En pratique, en cas d’indemnités indûment perçues par le salarié avant la décision du Conseil des Prud’hommes, le Pôle Emploi peut réclamer à celui-ci le remboursement des sommes.
Ainsi, si un salarié, ayant plus de deux ans ancienneté dans une entreprise d’au moins 11 salariés, touche une indemnisation équivalente aux 6 derniers mois, il n’y aura aucun délai de carence, cette indemnité des 6 derniers mois de salaire étant prévue par la loi.
En revanche, si le Conseil des Prud’hommes attribue, dans ce cas, une indemnité de 7 mois par exemple, le Pôle Emploi peut réclamer au salarié, le remboursement des indemnités chômage perçues et ce, dans la limite de 75 jours.
De même, s’agissant d’un salarié ayant moins de 2 ans d’ancienneté, dans la mesure où la loi ne prévoit un montant minimum et que l’indemnité est librement fixée par le juge, il existe aussi un délai de carence.
Tel est le cas également lorsqu’il s’agit d’un salarié qui travaillant dans une entreprise de moins de 11 salariés.
Ce mecanisme, incompris des justiciables, apparait particulièrement inequitable dans le mesure où il tend à faire peser sur le salarié une chrage financière une indemnité perçue au titre d’un préjudice subi.
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Cour de cassation
chambre sociale
5 septembre 2012
N° de pourvoi: 10-18800
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles 1235 et 1276 du code civil et 30 § 2 du règlement du 1er janvier 2004 annexé à la convention du 1er janvier 2004 relative à l’aide au retour à l’emploi et à l’indemnisation du chômage, ensemble l’article L. 5422-21 du code du travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X…, licencié pour motif économique le 29 juillet 2004, a perçu des allocations de retour à l’emploi à compter du 2 novembre 2004 ; que par jugement du 23 novembre 2005, la juridiction prud’homale jugeant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, a condamné l’employeur à lui payer une indemnité sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail, et à rembourser à l’ASSEDIC Languedoc-Roussillon, sur le fondement de l’article L. 1235-4 du même code, les allocations chômage versées à l’intéressé dans la limite de six mois d’indemnités ; que M. X… a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer le condamnant à restituer à l’ASSEDIC une somme correspondant à des allocations indûment versées après compensation avec des allocations chômage dues pour la période du 1er mars au 19 mars 2007, en application des articles 30 et 31 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004 ;
Attendu que pour recevoir cette opposition, débouter l’ASSEDIC de sa demande et la condamner à rembourser à l’intéressé une certaine somme au titre de trop perçus sur les prélèvements opérés sur ses indemnités de chômage, le jugement retient, d’une part, que la révision de l’indemnité de chômage, dont le salarié a acquis le droit par ses cotisations pendant une période déterminée, ne dépend pas de l’issue du litige avec l’employeur et que la demande d’allocation de retour à l’emploi prend uniquement en compte l’indemnité de licenciement, l’indemnité transactionnelle et la prime de départ, d’autre part, qu’est inopposable à l’intéressé, faute d’avoir été porté à sa connaissance au moment de l’attribution de l’allocation de chômage, l’article 30 § 2 du règlement annexé à la convention du 1er janvier 2004 ;
Qu’en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que le montant des dommages-intérêts alloués au salarié ne devait être exclu de l’assiette de calcul du délai de carence spécifique que pour la part correspondant au minimum fixé par l’article L. 1235-3 du code du travail, le juge de proximité a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 janvier 2010, entre les parties, par la juridiction de proximité de Sète ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Montpellier ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Pôle emploi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour Pôle emploi Languedoc-Roussillon
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le pourvoi fait donc grief au jugement attaqué, statuant sur opposition à une ordonnance d’injonction de payer, D’AVOIR écarté la demande que POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON avait formée afin d’obtenir le remboursement des allocations d’assurance-chômage qu’elle avait versées à tort à M. X… pendant la durée du délai de carence, et D’AVOIR condamné, en conséquence, POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON à lui payer la somme de 1 750 € en remboursement des prélèvements opérés prétendument à tort sur ses indemnités de chômage ;
AUX MOTIFS QU’il ne résulte pas des pièces produites par le demandeur au pourvoi que le fait pour le travailleur de gagner un procès contre son employeur doive entrainer automatiquement la révision de son indemnité de chômage dont il a acquis le droit par ses cotisations pendant une période déterminée ; en effet, la demande d’allocations joint à l’acceptation du PARE prend uniquement en compte l’indemnité de licenciement, l’indemnité transactionnelle est la prime de départ qu’aurait perçues le travailleur licencié ; que nulle part ne figure mention de gains futurs provenant de procès qu’il gagnerait devant le conseil des prud’hommes ; que de plus, en ce qui concerne les engagements du travailleur, la demande d’allocation indique : « VOS ENGAGEMENTS : Vous vous engagez :
– à vous présenter aux convocations et entretiens ;
– à participer aux actions définies en commun avec l’ANPE et formalisées dans un projet d’action personnalisée incluant le cas échéant en examen de vos capacités professionnelles et des actions de formation ;
– à rechercher, de manière effective et permanente un emploi, et à cet effet, à être disponible et accomplir, tant sur proposition de l’ANPE que de votre initiative, toutes les démarches en votre pouvoir en vue de votre reclassement ou de votre insertion professionnelle ;
– à donner suite aux offres d’emplois qui pourront vous être faites dans les conditions prévues par le code du travail » ;
QU’il est pas mentionné que le dit travailleur s’engage à de ne pas gagner un procès contre son employeur ; qu’en outre, l’article 30, alinéa 2, de ‘‘notre convention » évoqués par le demandeur est inopposable à M. Gérard X…, n’ayant pas été expressément porté à sa connaissance au moment de l’attribution de l’allocation de chômage ; qu’enfin, la jurisprudence produite par le demandeur est inopérante, le travailleur dont s’agit ayant cumulé allocations ASSEDIC et activité professionnelle ; qu’il résulte de ce qui précède que les prétentions du demandeur ne sont pas fondées ;
QUE le demandeur reconventionnel, par l’organe de son conseil, se porte demandeur reconventionnel et sollicite la condamnation du POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON à lui payer la somme de 1 750 € en remboursement des prélèvements opérés sur ces indemnités de chômage ; qu’il résulte des pièces du dossier que les prétentions ci-dessus mentionnées sont fondées ;
1. ALORS QUE le délai de carence prévu par l’article 30, § 1, du règlement annexé à la convention d’assurance-chômage du 1er janvier 2004 est augmenté d’un délai de carence spécifique en cas de prise en charge consécutive à une cessation de contrat de travail ayant donné lieu au versement d’indemnités ou de toute autre somme inhérente à cette rupture, quelle que soit leur nature, dès lors que leur montant ou leurs modalités de calcul ne résultent pas directement de l’application d’une disposition législative ; qu’il s’ensuit que les dommages et intérêts alloués par le juge pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doivent être pris en considération dans le calcul du délai spécifique d’indemnisation dès lors que la loi n’en détermine pas directement le montant qui est évalué souverainement par le juge en fonction du préjudice subi ; qu’en retenant, pour écarter l’application du délai spécifique d’indemnisation, que le service des allocations d’assurance-chômage ne devrait pas dépendre de la solution du litige qui oppose le salarié à son employeur devant la juridiction prud’homale au sujet du bien fondé de son licenciement, et que la demande d’allocation jointe à l’acceptation du PARE prendrait uniquement en compte l’indemnité de licenciement, l’indemnité transactionnelle et la prime de départ sans subordonner son paiement à la condition que le salarié n’obtienne pas gain de cause contre son employeur, au lieu de rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si les dommages et intérêts alloués à M. X… pour licenciement sans causse réelle et sérieuse ne résultaient pas directement de l’application d’une disposition législative, la juridiction de proximité a violé l’article 30, § 2, du règlement annexé à la convention d’assurance-chômage du 1er janvier 2004 ;
2. ALORS QUE le règlement annexé à la convention d’assurance-chômage s’impose à tous les salariés compris dans son champ d’application en raison de son agrément ministériel ; qu’en retenant, pour écarter l’application de l’article 30, § 2, du règlement annexé à la convention d’assurance-chômage, que cette disposition n’avait pas été expressément portée à la connaissance de M. X… lors de l’attribution de l’allocation d’assurance-chômage, la juridiction de proximité a violé l’article L 5422-21 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le pourvoi fait donc grief au jugement attaqué D’AVOIR condamné, en conséquence, POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON à restituer à M. X… la somme de 1 750 € en remboursement des prélèvements opérés sur ses indemnités de chômage ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X…, par l’organe de son conseil, se porte demandeur reconventionnel et sollicite la condamnation du POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON à lui payer la somme de 1 750 € en remboursement des prélèvements opérés sur ces indemnités de chômage ; qu’il résulte des pièces du dossier que les prétentions ci-dessus mentionnées sont fondées ;
ALORS QU’en s’abstenant d’analyser, même de façon sommaire, les pièces sur lesquelles elle s’est fondée pour ordonner le remboursement par POLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON des allocations qui auraient été prélevées à tort, la juridiction de proximité n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du Code de procédure civile