Des courriers de mise en garde de l’employeur ne constituent pas des avertissements
Dans un arrêt en date du 5 juillet 2001, la cour de cassation a jugé que les courriers de l’employeur à une salariée se bornant à la mettre en garde sur la portée de ses propos (accusations par écrit envoyé à la Direction d’une collègue) ne constituent pas des avertissements.
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Cass. soc., 5 juillet 2011, n°10-19.561
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X… a été engagée le 6 octobre 2000 par l’association Mosellane d’aide aux personnes âgées (l’AMAPA ), et a été licenciée pour faute grave, le 30 mars 2005, pour avoir accusé une de ses collègues, par courrier adressé à la direction, de faire preuve d’une « discrimination totale » et d’un « comportement raciste », sans que ces faits soient établis ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l’arrêt de dire que son licenciement est fondé sur une faute grave, alors, selon le moyen, que l’employeur ne peut prononcer un licenciement pour des faits qu’il a déjà sanctionnés ; que dans la lettre de licenciement du 20 mars 2005, l’employeur a reproché à la salariée d’avoir, par courrier du 9 février 2005 réceptionné le 16 février adressé au président et à la Direction générale de l’association, accusé nommément une de ses collègues de faire preuve notamment d’une discrimination totale et d’un comportement raciste sans avoir justifié dans son courrier du 3 mars suivant, de ces accusations calomnieuses et d’avoir persisté en maintenant ces mêmes accusations jusqu’à la lettre d’excuse ; que la cour d’appel qui a relevé que l’AMAPA avait donné un avertissement et mis en garde la salariée pour cette unique dénonciation et qui a décidé que le licenciement était justifié, sans caractériser un nouveau comportement fautif de la salariée , a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 1331-1 du code travail ;
Mais attendu qu’ayant relevé que les courriers de l’employeur à la salariée des 17 et 25 février 2005 se bornaient à la mettre en garde sur la portée de ses propos, la cour d’appel, qui a retenu qu’ils ne constituaient pas des avertissements, a légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que la salariée fait grief à l’arrêt de dire que son licenciement est fondé sur une faute grave et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent écarter une attestation au seul motif qu’elle émane de membres de la famille ou d’un ami de l’intéressé ; qu’en approuvant les dires de l’employeur selon lequel les attestations produites par l’exposante émanaient de sa fille ou de son ami, ce qui excluait toute valeur probante, la cour d’appel a violé les articles 201 et 205 du code civil ;
Mais attendu que le moyen ne tend qu’à remettre en cause l’appréciation souveraine des juges du fond sur la valeur probante des éléments qui leur étaient soumis ; qu’il ne peut donc être accueilli ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la salariée reproche à l’arrêt de la débouter de sa demande de rappel de salaire, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque lorsqu’une partie invoque un indice de rémunération résultant d’une convention collective, les juges sont tenus de rechercher en invitant si nécessaire les parties à s’expliquer sur les dispositions de la convention collective, l’indice applicable à la salariée compte tenu de son emploi ; qu’en énonçant qu’aucun élément du dossier ne justifiait la position de Mme X…, la cour d’appel qui n’a pas recherché quel était l’indice et la classification conventionnelles qui devaient lui être appliqués compte tenu des ses tâches et fonctions a violé par refus d’application les articles 3 et 4 de l’accord relatif aux emplois et rémunérations du 29 mars 2002 de la convention collective de l’aide à domicile ;
2°/ que les bulletins de salaire de Mme X… mentionnent un emploi d’« assistante de secteur » ; qu’en énonçant que les bulletins de salaire mentionnaient les fonctions « d’aide-ménagère », la cour d’appel a dénaturé les bulletins de salaires versés aux débats, violant le principe de l’interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause, et l’article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d’appel qui a constaté, hors toute dénaturation, que les fonctions de la salariée telles que détaillées par elle-même ne correspondaient pas aux fonctions décrites par la convention collective pour la catégorie D-assistante-technique, a fait une juste application des dispositions conventionnelles en décidant qu’elle ne pouvait prétendre à cette classification ; que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l’article L. 1132-3 du code du travail ;
Attendu que pour dire la rupture justifiée par une faute grave, l’arrêt retient le caractère calomnieux des dénonciations faites par la salariée à l’encontre d’une autre salariée ainsi que la gravité de ces dénonciations pénalement répréhensibles ;
Attendu, cependant, que le fait pour un salarié de porter à la connaissance de son employeur des faits concernant l’entreprise, susceptibles de qualification pénale, ne constitue pas en soi une faute ;
Qu’en statuant comme elle l’a fait, sans s’expliquer sur le caractère calomnieux des propos qui était contesté, ni par suite rechercher si la salariée avait agi de mauvaise foi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, sans qu’il y ait lieu de statuer sur la première branche du deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme X… était fondé sur une faute grave, l’arrêt rendu le 28 avril 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Metz ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Nancy ;